On se demande à la suite de quel incroyable mouvement de distraction les Éditions Nathan, organe relativement officieux du Ministère de l'Éducation nationale (Cf. par exemple Et voilà pourquoi ils ne savent pas lire, 1985, d'Hélène Huot, passim, et surtout page 71) ont pu laisser publier un ouvrage aussi sulfureux et politiquement incorrect que celui dont nous présentons ci-après quelques bonnes feuilles.
Mais l'erreur semble avoir été rattrapée, car cette parution n'a fait l'objet d'aucune publicité, et donc n'a connu aucun retentissement. Ce qui est dommage, car l'auteur, bon connaisseur de notre système éducatif, se livre à une joyeuse bousculade, sans tabous mais toujours argumentée et présentée avec un humour souvent ravageur, de ce que certains nomment sans rire le meilleur système éducatif au monde. Nous donnons ci-après plusieurs extraits de cet important ouvrage, en commençant par... la conclusion, car elle nous paraît fort bien donner le ton de l'ensemble. On pourra noter, pour la petite histoire, que cinq ans avant le Ministre Cl. Allègre, G. Jacquet dénonçait, entre autres, la manipulation des collégiens et lycéens. Et que la page concernant la distribution des cartes syndicales a vieilli : comme l'on sait en effet, l'éclatement de la FEN s'est effectué en deux tendances rivales, l'une dite FSU, de sensibilité communiste, qui emporte environ deux tiers des suffrages enseignants, le troisième tiers étant attribué à la "FEN maintenue", de sensibilité socialiste (le fait de s'être très récemment rebaptisée UNSA-Éducation ne changera rien à la spirale de son déclin).
Sur l'auteur : Gilbert Jacquet (né en 1927, et dont une longue maladie a eu raison en 2004), longtemps formateur d'Inspecteurs à Auteuil, nous paraît meilleur vitupérateur que solide pédagogue - puisqu'aussi bien nous eûmes, jadis, à le subir. Ce que peu savent, c'est qu'il est avant tout connu pour sa passion du vol à voile - moniteur dans cette discipline, il a écrit plusieurs ouvrages qui font autorité parmi les adeptes de ce beau sport

 

 

 

I. Extrait de la conclusion (pp. 162-163)

 

[...] La réforme de l'enseignement doit être un choix de société, mais de la société tout entière. Elle doit, si elle est décidée, s'inscrire dans la durée et ne pas être soumise aux aléas des changements de gouvernement. Elle suppose de mettre à plat tous les problèmes, de clarifier les choix, de définir des champs de compétence précis aux différents acteurs du système et de prendre tout le temps nécessaire pour mener la réflexion à son terme. Doit-elle s'orienter vers la seule transmission du savoir comme l'impliquerait un retour à l'instruction ? Doit-elle privilégier le développement des personnalités et ne pas hésiter à s'engager dans le domaine des valeurs ? Doit-elle choisir une autre direction à déterminer ? Ce n'est pas à nous de le dire. C'est l'affaire de tous les citoyens, à condition qu'ils soient clairement informés de toutes les implications des différentes options.

Anatole de Monzie, nous l'avons vu, avait souhaité réunir en une loi unique tous les textes fondamentaux qui avaient contribué à créer notre système d'enseignement. L'idée est intéressante. Doit-elle être reprise ? Ce sera aux réformateurs d'en décider. Quelle que soit la solution choisie, ils seront bien avisés de régler un problème qui, à intervalles plus ou moins réguliers, empoisonne les relations parents-enseignants. C'est celui de la responsabilité d'accidents survenus aux élèves pendant des activités scolaires obligatoires comportant une part de risque : natation, enquêtes par petits groupes, classes de neige... À partir du moment où c'est l'État qui impose, préconise, autorise, tolère certaines pratiques, c'est à lui d'en supporter la responsabilité devant les juridictions administratives pour mauvaise organisation du service.

Quels que soient la forme et le contenu de la réforme, sa mise en œuvre exige un gouvernement fort et courageux, capable de ne pas céder aux sollicitations électoralistes. Il n'est pas admissible qu'un secrétaire général d'un Syndicat national enseignant (1) puisse se vanter de pouvoir "faire la peau d'un ministre" [in Tant qu'il y aura des profs, Hervé Hamon et Patrick Rottman, Seuil, 1984]. Il n'est pas normal que des potaches descendent dans la rue pour contester une réforme des universités sous prétexte de réclamer naïvement que les portes de l'enseignement supérieur doivent leur être ouvertes, sans sélection ni orientation, grâce au seul bac qu'ils n'ont pas encore.

Faute de respecter ces quelques orientations, il y a gros à parier que toute réforme de notre système d'enseignement a toute chance de s'enliser. Mais les pouvoirs publics ont-ils la volonté de se lancer dans une réforme dont la nécessité a été démontrée ?

 

 

II. Extraits du chapitre Le dysfonctionnement institutionnel (pp. 80-85)

 

L'impuissance des associations représentatives

 

Les représentants des associations familiales et des grandes centrales syndicales représentatives semblent les mieux placés pour apporter au monde enseignant une vision de l'extérieur lui permettant de prendre conscience, non plus de la manière dont il se perçoit, mais de celle dont il est perçu. Chargés d'exprimer les attentes véritables des usagers, ou bien ils ont une vision parcellaire du terrain dont ils prétendent rendre compte, ou bien les organisations qui les ont désignés les ont spécialisés dans les problèmes de l'enseignement, voire choisis parce qu'ils avaient été enseignants avant de devenir permanents. À tous respirer le même air, il est difficile de le renouveler.

 

Syndicalisme et carriérisme

 

Il ne faut pas chercher l'espoir d'un renouvellement du côté des permanents des organisations professionnelles enseignantes.

Qu'on ne se méprenne pas ! Il ne s'agit pas d'attaquer le principe du syndicalisme ni de mettre en cause le militantisme de la plupart des responsables syndicaux dont le dévouement à leurs camarades est incontestable. Cependant, à examiner le comportement de certains d'entre eux, on se pose des questions. Au lieu de se mettre au service des intérêts de leurs collègues, il en est qui n'ont d'autre souci que leur propre devenir. Au lieu d'être une vocation, le syndicalisme devient un moyen de se lancer dans une carrière dont le couronnement s'opère lorsqu'ils deviennent permanents ou, mieux encore, font partie de l'état-major d'un bureau national d'un syndicat ou d'une fédération. Une telle affirmation est-elle exagérée ? Alors, qu'on explique pourquoi un ancien secrétaire général, l'âge de la retraite venu, est-il nommé conseiller d'État en service extraordinaire par un gouvernement auquel il était censé s'opposer ? (2) Pourquoi tel autre termine-t-il sa carrière active comme inspecteur général de l'Éducation nationale (3) après être passé par le Conseil économique et social où il n'a pas été désigné par les organisations sociales représentatives, mais par le gouvernement au titre des "personnalités qualifiées dans le domaine économique, social, scientifique ou culturel" [Ordonnance nº 58-1360 du 29 décembre 1958, J.O. du 30 décembre 1958, p. 12034] ? Pourquoi celui-ci est-il appelé à la tête d'un comité fédérant une bonne soixantaine d'associations proches de l'école publique ? Pourquoi ce dernier, pourtant victime d'une révolution de palais dénonçant son incapacité à diriger une centrale syndicale, est-il chargé de représenter le syndicalisme français dans une instance internationale ? Au lieu de tels reclassements - dont on ne peut s'empêcher de penser qu'ils récompensent des services plus ou moins occultes rendus au pouvoir en place, surtout lorsqu'il s'agit de sinécures offertes à ceux qui n'ont pas encore atteint l'âge de la retraite, il paraîtrait tellement plus logique de les voir retrouver un poste correspondant à leur grade dans cette école dont ils ont parlé si haut et si fort.

Après tout, au seul plan des ambitions humaines, ce comportement, s'il est critiquable, n'est pas forcément préjudiciable à la catégorie de fonctionnaires représentés. Cette espèce particulière d'individus, qui utilisent la défense des intérêts collectifs pour assurer leur promotion individuelle, n'est spécifique ni au monde enseignant ni au monde syndical. Cependant, au-delà de ces attitudes contestables, on peut se demander si les buts qu'ils poursuivent ne sont pas plus pernicieux. Cela nous oblige à un retour en arrière.

Lors de l'éclatement de la CGT, lorsqu'en 1948 la Fédération de l'Éducation nationale (FEN) - qui, malgré la scission du 6 octobre 1992, demeure le syndicat le plus important du monde enseignant - s'est constituée en fédération autonome, c'est, d'une part, pour refuser de s'inféoder à un parti politique, d'autre part, pour pouvoir se cantonner dans la défense des intérêts corporatifs sans se lancer dans des batailles idéologiques. On peut se demander si ces principes sont toujours appliqués.

 

L'empiétement syndical

 

Au fil du temps les principes syndicaux semblent bien avoir été abandonnés dans les faits. La pratique syndicale donne l'impression qu'il n'existe plus une identité de vue parfaite entre les syndiqués de base et les permanents syndicaux qui siègent dans les hautes sphères. Les premiers, dans leur immense majorité, ne s'intéressent qu'à leurs conditions de travail et au déroulement de leur carrière. Les seconds ont profité de leur position dans les instances consultatives auxquelles ils participent pour essayer d'imposer leur propre conception du devenir de l'école. Celui-ci est un problème de société qui concerne l'ensemble des citoyens. Il ne peut être l'apanage de quelques-uns qui, sous prétexte qu'ils représentent une partie des enseignants, s'arrogent le droit de parler au nom de la totalité de la population qui ne les a nullement mandatés à cet effet. On se trouve alors dans une situation identique à celle qu'offrirait dans l'automobile un puissant syndicat ouvrier qui, sans s'occuper des conditions du marché ni des désirs de la clientèle, prétendrait, au nom de sa spécialisation, définir seul les modèles et la quantité de voitures à construire. C'est ce qui se passe dans l'enseignement. Et avec une rare efficacité. Au point qu'on en arrive à se demander s'il n'y a pas un véritable détournement de l'article 20 de la Constitution. Alors que celui-ci précise que, pour conduire son action, le gouvernement dispose de l'administration - donc des interlocuteurs qu'il a en face de lui lors des discussions paritaires, on a parfois l'impression que quelques individus, forts de leur mandat représentatif, disposent du gouvernement pour tenter de donner le jour à des idéologies dont ils se réclament à quelques-uns mais en prenant soin de n'en rien laisser paraître. Ils y sont aidés par tout un courant d'opinion. À un moment où, on se demande d'ailleurs pourquoi, la notion de corporatisme se dévalorise, ces permanents syndicaux de haut niveau, qui pourtant appuient leur légitimité sur l'existence d'adhérents appartenant au même corps qu'eux, se sentent fondés à théoriser sur l'école et la société. Il faut reconnaître que ces thèmes peuvent donner lieu à des développements dialectiques beaucoup mieux médiatisables et médiatisés que des propos sur des grilles de salaires et les déroulements de carrière réservés au seul usage interne, mais qui conditionnent le renouvellement des mandats. Alors, sans état d'âme, grâce à un système de cooptation qui leur permet de rester entre eux afin de mettre en œuvre un projet politique inavoué, ils se précipitent partout où il y a des réunions. Surtout à celles organisées par les instances consultatives informelles dont le développement s'est accru d'une manière considérable au cours du dernier quart de siècle, c'est-à-dire depuis que les directeurs, en principe maîtres de leurs objectifs et de leurs moyens, ont été dépossédés d'une partie de leur pouvoir par les cabinets ministériels.

 

La politisation syndicale

 

Il arrive aussi que ces permanents, malgré leur refus réaffirmé de toute inféodation partisane, n'hésitent pas à se mettre au service d'un parti politique. Qu'un permanent syndical adhère à tel ou tel parti, sur le plan privé, c'est son droit le plus strict. Mais son attitude est beaucoup plus contestable lorsqu'il utilise son mandat à promouvoir ses opinions personnelles, y compris au détriment d'une attitude objective. À cet égard, le comportement du Syndicat national des instituteurs (SNI) est significatif.

En février 1975, René Haby, alors ministre de l'Éducation, a publié à la Documentation française un numéro spécial des Cahiers français intitulé "Pour une modernisation du système éducatif". Afin "de tenir compte, dans le déroulement des études de l'enfant, de ses caractéristiques personnelles et, en particulier, de l'évolution de sa maturation intellectuelle, physiologique et affective", il proposait d'organiser le cursus primaire en trois cycles. La levée de boucliers syndicale, appuyée sur toute une série d'arguments techniques et pédagogiques, a été telle que les dispositions annoncées dans cette brochure n'ont pas été reprises dans sa loi du 11 juillet 1975 relative à l'éducation. En revanche, lorsque Lionel Jospin fait voter sa loi d'orientation sur l'éducation (10 juillet 1989) où il reprend des dispositions analogues, les mêmes syndicats applaudissent à tout rompre. Il est vrai que la note de service du 11 mars 1991 définissant les "orientations pour la mise en oeuvre de la politique pour l'école" précise que celle-ci a pour principe "une meilleure prise en compte des spécificités des apprentissages de chaque enfant", ce qui, manifestement, n'a rien à voir avec la reconnaissance "de ses caractéristiques personnelles..." (voir plus haut).

Dans le même ordre d'idées, il y a encore mieux. Lorsque René Haby propose d'instaurer un livret scolaire destiné à suivre l'élève tout au long de sa scolarité, on l'accuse de vouloir créer une sorte de fiche de police portant atteinte aux droits de l'homme et qui contraint chaque enfant, sa vie scolaire durant, à subir le fardeau d'une défaillance. Lorsque les services de Lionel Jospin lancent le livret scolaire, celui-ci est devenu "un indispensable instrument de liaison" permettant d'assurer "une continuité véritable du service public". Les dirigeants syndicaux nationaux demeurent silencieux. Pourtant, s'ils avaient été à l'écoute de leur base, ils auraient appris que les trois cahiers proposés, se rapportant aux cycles des apprentissages premiers, des apprentissages fondamentaux et des approfondissements, n'avaient pas la faveur des maîtres. Ces outils d'évaluation, comportant suivant le cycle concerné de quatre-vingt-seize à cent quarante-deux rubriques qu'il faudrait remplir pour chaque élève jusqu'à huit fois chaque année scolaire, sont jugés beaucoup trop lourds et dévoreurs de temps. Aussi, devant le mutisme syndical, les instituteurs n'en ont pas contesté le principe, mais ils ont décidé de les adapter. Un peu partout et à des niveaux différents - celui des inspections académiques, des circonscriptions départementales d'inspection, voire de groupes scolaires, des commissions de travail sont nées qui ont entrepris de les modifier et surtout de les simplifier.

Ces deux exemples sont significatifs. Ils invitent à se demander si les attaques portées contre le projet de Haby et le soutien louangeur accordé à Jospin ne visent pas tant les contenus de leurs textes que la personnalité de leurs auteurs et principalement leur appartenance politique. Rappelons que le premier était membre d'un gouvernement classé à droite, le second d'un gouvernement dit de gauche. Rappelons également que les dirigeants du SNI-PEGC et de la tendance majoritaire de la FEN sont proches du Parti socialiste. Ceci explique-t-il cela ? Le seul fait que la question puisse se poser laisse rêveur sur la sincérité des objectifs poursuivis par certains responsables syndicaux. (4)

 

 

III. Extraits du chapitre L'impossible partage des compétences (pp. 94-153)

 

Les enseignants fragiles

 

Tout le monde s'accorde à reconnaître que, plus que d'autres, le métier d'enseignant est stressant, éprouvant pour les nerfs. Pourtant, lors du recrutement des pédagogues, on ne cherche qu'à vérifier leurs compétences intellectuelles. À l'exception d'un examen physiologique sommaire, on ne cherche pas à contrôler leurs aptitudes nerveuses et psychologiques. En revanche, nul ne s'étonne d'apprendre que tous les pilotes professionnels - c'est-à-dire non seulement ceux qui font la ligne, mais également ceux qui enseignent dans les aéro-clubs - doivent passer tous les six mois un examen d'aptitude dans un centre d'expertise médicale du personnel navigant. À se demander si la société dans laquelle nous vivons n'est pas trop attentive à veiller à la sécurité des passagers aériens, mais se désintéresse du devenir de générations d'enfants qui se succéderont pendant plus de trente-cinq ans et pourront être confiés à des enseignants mentalement fragiles ! Ou sadiques ! Certes, ils sont une minorité dans la profession. Mais ne serait-il pas plus sain, pour la bonne réputation de celle-ci, de soumettre tous les postulants au métier d'enseignant à un examen psychiatrique qui permettrait d'éliminer les déviants ? Au lieu de quoi on les laisse entrer dans une voie où les conditions d'exercice ne peuvent qu'aggraver leur état. (5)

 

La rente de situation des incapables

 

L'enseignement, comme les autres professions, compte un certain nombre d'incapables. Ils sont une minorité, mais lorsque leur incapacité est connue - leurs collègues et les parents de leurs élèves s'en rendent très vite compte -, elle rejaillit sur la réputation de la totalité de l'établissement où ils sévissent. Dans le secteur privé - et encore, à la condition que l'entreprise ne soit pas quantitativement très importante - le salarié qui n'assure pas correctement son travail peut être licencié. Rien de semblable dans la fonction publique. Sauf en ce qui concerne la gestion et le maniement de fonds, l'incompétence professionnelle n'est pas une faute professionnelle. Elle peut être officiellement reconnue pas plusieurs inspecteurs successifs intervenant ou non sur plainte des parents. Dans l'hypothèse la plus pénalisante pour le fautif, elle n'entraîne qu'un déplacement d'office, généralement négocié, mais non pas infligé par une instance disciplinaire. Jamais une révocation. Changer de poste l'incompétent n'aboutit qu'à déplacer géographiquement le problème, non à le résoudre. Pour pouvoir révoquer un enseignant en raison de son inaptitude au métier, il faut qu'il se rende coupable d'autres actes qualifiés, eux, de fautes professionnelles (manquement à l'obligation de réserve, retards répétés, absence à une conférence pédagogique...). L'inaptitude intervient alors comme circonstance aggravante, jamais comme cause principale. Il serait facile de citer des exemples d'enseignants qui n'ont jamais rien fait d'autre dans leurs classes que d'attendre les vacances et qui atteignaient l'âge de la retraite dans un état de fraîcheur physique remarquable. Surtout comparé à celui de collègues du même âge beaucoup plus sérieux dans leur travail.

Pourtant, au début des années 80, tout un courant de pensée a voulu porter remède à cette situation. Peut-être n'a-t-il pas dépassé le stade de la rumeur ? Je n'en ai retrouvé aucune trace écrite. Autant qu'il me souvienne, cette réflexion partait d'un constat. Quel que soit le mode de sélection privilégié, l'administration est incapable de concevoir un filtre parfait interdisant l'accès à la fonction publique de fonctionnaires incompétents. D'autre part, entre des administrations différentes, il n'existe plus de barrières infranchissables comme cela a été le cas pendant de longues années. Par exemple, un jeune qui entre dans l'enseignement peut très bien satisfaire à son engagement quinquennal ou décennal hors Éducation nationale, dès lors qu'il exerce dans la fonction publique. En conséquence, une carence occasionnelle de l'administration dans le recrutement de ses agents ne devrait pas la conduire à créer une véritable rente de situation au profit de quelques incapables. Aussi, en cas d'incompétence reconnue, envisageait-on, dans un premier temps, de proposer que le fonctionnaire défaillant discute avec sa hiérarchie d'un reclassement, à grade équivalent et sans passer de nouveaux concours, dans une administration différente de celle d'origine. Si, à ce nouveau poste, il venait, une fois de plus, à démontrer son incapacité professionnelle, alors, pour ce seul motif, il pouvait encourir une révocation pure et simple prononcée par une instance disciplinaire normale. Une telle procédure présentait un double avantage. Elle permettait à l'administration d'améliorer son image de marque. Elle sauvegardait les intérêts du fonctionnaire en lui offrant une possibilité de se racheter. Malheureusement, la loi du 11 janvier 1984 portant statut de la fonction publique d'État n'a pas repris à son compte ces propositions [Statut de la fonction publique : Loi nº 84-16 du 11 janvier 1984, J.O. du 12 janvier 1984, p. 271. RLR 610-0].

Cette reconnaissance de l'existence dans le corps enseignant de malades mentaux et de paresseux ne doit pas masquer la réalité des faits. Il ne s'agit que de quelques marginaux qui constituent une minorité. Cela étant posé, dans ce qui va suivre, notre propos ne concerne que leurs collègues qui, dans leur immense majorité, sont des gens compétents, dévoués à leurs élèves. Mais, lorsqu'on parle d'éducation, où s'arrête la compétence ? Où finit le dévouement ?

 

Les difficultés à enseigner

 

Face à un programme aux contenus maîtrisés, l'enseignant compétent sait où se situer, est capable de s'auto-évaluer. En avance, il dispose de temps pour vérifier que les connaissances ont été bien assimilées et pour les consolider. En retard, aux contrôles oraux il devra préférer les contrôles écrits qui lui demanderont davantage d'effort personnel, mais qui, dans le temps scolaire, lui laisseront plus de possibilités de se mettre à jour. Une fois sa journée terminée, à la limite, il n'est plus responsable de la manière dont ses élèves viennent à bout de leur part de travail personnel. En revanche, lorsqu'il s'agit de participer à la formation d'une personnalité, il devient difficile d'apprécier le moment où la tâche est terminée. Même si le maître peut s'estimer satisfait de son œuvre, il est conduit à une constante remise en question. Le sentiment d'avoir réussi avec tel élève l'autorise-t-il à transposer la méthode utilisée au cas de tel autre ? Ne pouvant faire totalement abstraction de sa propre personnalité, ne lui arrive-t-il pas de penser que tel enfant confié à ses soins serait dans une situation plus performante entre les mains d'un autre pédagogue ? Il y a là de quoi en effrayer plus d'un ! Ou, pour le moins, de les placer dans une situation inconfortable ! D'ailleurs, d'une manière plus générale, une société a-t-elle le droit d'imposer une telle responsabilité à certains de ses membres ? D'autant que le problème est beaucoup plus complexe que la simple image que nous venons d'en présenter.

 

De l'obligation de moyens à l'obligation de résultats

 

En effet, officiellement, le service public d'éducation n'est tenu qu'à une obligation de moyens. En réalité, et d'une manière plus ou moins diffuse, on assigne aux enseignants une obligation de résultats. Cette transformation n'est pas le seul fait des parents - sur le rôle desquels nous aurons à revenir, elle est aussi celui des pouvoirs publics. Les incendies de forêts se multiplient. C'est au moins autant la faute de l'école que celle des pyromanes. On va donc créer une journée de l'arbre. Le taux de chômage reste très préoccupant. Il n'est pas lié aux conditions économiques. Il est la conséquence de l'inadaptation de l'école au monde du travail. À la veille d'une échéance électorale, les instituts de sondage pronostiquent un pourcentage important d'abstentionnistes. Le manque de civisme que traduit ce comportement n'est en aucun cas le résultat de l'exemple présenté par certains politicards, il est la conséquence de l'absence de formation civique à l'école [...].

 

La suppression des devoirs à la maison

 

[C. du 29 décembre 1956, RLR 514- 3, 550-1a ; BOEN nº 1 du 13.1.1957, p. 63 ; C. du 28 janvier 1971, RLR514-3, 550-1a, BOEN n° 5 du 4.2.1971, p. 348]

 

[...] La limitation de la journée de l'adulte à huit heures est une conquête syndicale. Mais les mêmes, qui se félicitent de cette victoire, ne sont pas scandalisés de constater que la journée d'un élève peut être supérieure à huit heures. Cette différence de traitement entre l'adulte et l'enfant est choquante (6). D'où l'urgence, par la suppression des devoirs à la maison, de limiter la journée scolaire à six heures pour les élèves de l'école primaire. "Un supplément de travail soutenu ne peut qu'apporter une fatigue préjudiciable à la santé physique et à l'équilibre nerveux des enfants".

À constater le peu d'effet de cette interdiction, on peut se demander si la motivation qui en est donnée ne procède pas de bons sentiments. Pour inefficace qu'elle soit, cette mesure est-elle justifiée ? Les élèves n'ont-ils pas besoin de consolider leurs connaissances par des exercices appropriés qui ne peuvent plus, devant l'ambition de certains programmes, être effectués dans le temps scolaire ? C'est une question ouverte à laquelle il est difficile d'apporter une réponse univoque.

L'autre école, jamais exprimée dans les textes officiels, prétend apporter une justification différente de cette interdiction. Si, dans le temps scolaire, tous les élèves d'une même classe sont soumis aux mêmes conditions de travail, il n'en va pas de même lorsqu'ils rentrent à la maison. Certains disposent d'un espace de travail dans leur chambre individuelle. D'autres, au milieu du bruit, doivent partager avec leurs frères et sœurs la table commune. La suppression des devoirs à la maison devient donc une simple mesure de justice sociale.

Un tel raisonnement pêche par plusieurs points. Une fois de plus, il y a identification de l'égalité des chances avec l'égalité des conditions de vie qui conduit à demander à l'école de jouer un rôle qui n'est pas le sien. Vouloir aligner l'ensemble d'une population scolaire sur les plus démunis d'entre elle risque, à terme, d'être préjudiciable à la collectivité par un abaissement général du niveau des connaissances. Cette justification, en apparence égalitaire, ne manque pas d'hypocrisie ou, si elle est sincère, démontre chez ses auteurs une belle dose de naïveté. En effet, qu'est-ce qui interdit à des parents soucieux du devenir scolaire de leurs enfants de leur donner eux-mêmes des devoirs ? Qui aura le pouvoir de les contrôler ? Il ne s'agit pas là d'une hypothèse gratuite. Alors même que l'école n'a jamais imposé de travail pendant les vacances scolaires, les maisons d'édition n'hésitent pas à proposer des cahiers de devoirs de vacances correspondant aux différentes étapes de la scolarité. D'après ce qu'il est possible d'en savoir, ce n'est pas un créneau où elles perdent de l'argent. En outre, cette proposition est tragique. Méconnaissant la nécessité d'une consolidation des acquis, elle contribue à diminuer les connaissances des plus déshérités et, par conséquent, leurs possibilités de qualification professionnelle. Sous couleur de ne pas les défavoriser scolairement parlant, on les enferme dans leur environnement familial culturel où ils ont peu de chances de trouver des raisons de se dépasser, de progresser. Il est vain alors de demander aux enseignants, dans la solitude de leurs classes, de contrebalancer eux-mêmes, par la seule vertu de leur talent, les effets des inégalités sociales.

 

La scolarisation des enfants de deux ans

 

Il est un autre domaine où on assigne à l'école un rôle social et non pas d'enseignement. C'est celui de la scolarisation des enfants de deux ans. Que l'accueil de ceux-ci soit devenu indispensable eu égard aux conditions de la vie moderne, c'est une réalité. Mais elle relève d'un traitement social et non pas éducatif. Il n'est pas indispensable de demander à l'école de satisfaire un besoin qui pourrait l'être à moindre coût par la crèche ou la garderie (7)

Tout d'abord, il faut dénoncer ici une pratique devenue courante. L'accueil des deux ans en maternelle sert bien souvent d'alibi. En effet, en inscrivant ces petits écoliers, qui peut-être ne franchiront jamais les portes de l'école puisqu'il n'y a aucune obligation de fréquentation, il devient possible d'annoncer des effectifs permettant d'éviter la fermeture d'une classe.

Ce jeu avec des normes administratives n'est grave que dans la mesure où il se traduit par des coûts supplémentaires en postes budgétaires. Si les contribuables, à condition d'en être clairement informés, sont d'accord avec une telle pratique, pourquoi la contester ?

En revanche, lorsque la fréquentation des deux ans devient effective, elle pose d'autres problèmes, pédagogiques et financiers. Tout d'abord, il faut savoir que si on est bien informé sur la psychologie de la première enfance, on ignore tout de la pédagogie à lui appliquer. On se heurte à une barrière. Lorsqu'il est à ce stade, l'enfant est capable d'exprimer des besoins, mais il n'a pas encore une personnalité propre en mesure de se poser et de s'opposer. Il procède par imitation et identification. En d'autres termes, par imitations successives, il établit des représentations internes de certaines caractéristiques des adultes de son environnement auxquels il finit par s'identifier. Mais peut-on fonder une pédagogie efficace sur la seule identification ? En l'état actuel de nos connaissances, la réponse est négative. D'autre part, son développement physiologique lui impose encore de longues siestes. Est-il nécessaire de confier ces petits à des professeurs d'école, titularisés à " bac + 5 " et rémunérés comme tels, qui ne sauront rien leur enseigner et qui passeront une bonne partie de leur temps à surveiller leur sommeil ? Le coût d'un tel service, par essence social, ne devient-il pas excessif pour la communauté lorsqu'il se prétend éducatif ? [...]

Dans le même ordre d'idées, on peut s'étonner de la récente ouverture des classes maternelles aux enfants de deux ans. En effet, est-il nécessaire d'abaisser aussi bas l'âge de la pré-scolarisation qui ne saurait être confondue avec le gardiennage de la crèche ou de la garderie ? Celles-ci répondent à des préoccupations sociales, la maternelle à des préoccupations éducatives. La confusion des genres est d'autant plus dangereuse que, si les connaissances psychologiques sur l'enfant de trois ans et plus ont permis d'inventer des méthodes pédagogiques adaptées à son âge, il faut bien reconnaître que ce n'est pas le cas pour l'enfant de moins de trois ans. Même en s'appuyant sur le fait que c'est en marchant qu'on démontre le mouvement, si l'accueil des tout jeunes doit permettre d'innover en la matière, on se heurtera toujours à un obstacle physiologique. Est-il nécessaire de confier ces enfants à une maîtresse diplômée à bac + 5 pour passer des après-midi, de surcroît en compagnie d'une ASEM, à surveiller le sommeil des gamins qui lui sont confiés, et, bien entendu, pour un horaire hebdomadaire de vingt-sept heures dont vingt-six en présence des élèves ?

Est-il possible d'espérer un changement dans la gestion des coûts ? C'est douteux ! Ou alors il faudrait un changement complet dans les mentalités. En effet, il faut savoir que dans l'enseignement les horaires hebdomadaires sont définis en fonction du grade et non de la matière enseignée. En lettres, on ne fait aucune différence entre un certifié qui enseigne en sixième et celui qui a la responsabilité d'une classe de première. Comme si la correction des rédactions et celle des dissertations représentait une charge de travail identique ! Dans le même ordre d'idées, l'agrégé d'arts plastiques ou d'éducation musicale - dont chacun sait qu'ils croulent sous le poids des devoirs rapportés à la maison au point de se déformer la colonne vertébrale - ont un horaire identique à celui de l'agrégé de mathématiques ou de philosophie ! Revoir matière par matière et niveau par niveau la définition des horaires de service ne manquerait pas d'aboutir à une redistribution des masses horaires et, par conséquent, des postes budgétaires. Effet indirect, une telle révision contribuerait à régler en partie la crise de recrutement dont souffre l'enseignement. Mais une telle remise en cause du sacro-saint principe des droits acquis ne pourrait qu'apparaître sacrilège aux intéressés !

Pourtant, il faudra bien se décider un jour à prendre des mesures. Il est impossible de dénoncer les carences d'un système et de continuer en même temps à le subventionner comme si de rien n'était. À titre d'indication, le budget 1993 de l'Éducation nationale est en progression de 7,2 % par rapport à celui de 1992. Les syndicats saluent cette priorité renouvelée en faveur de l'avenir de la jeunesse, mais ils dénoncent ses insuffisances. Jusqu'où faudra-t-il aller dans les dépenses publiques ? À la longue, les contribuables ne risquent-ils pas de se lasser ? [pp. 151-153] (8)

 

Décharges de classe

 

[Circulaire nº 70-204 du 27 avril 1970, RLR 721-2, BOEN nº 19 du 7.5.1970, p. 1604]

 

Depuis la circulaire du 27 avril 1970, sous la pression syndicale, les directeurs d'école - qui ne sont pas des chefs d'établissement, qui n'ont donc aucune autorité hiérarchique sur leurs collègues et qui n'ordonnancent aucun budget - ont obtenu des décharges de classe pour pouvoir accomplir leurs tâches administratives. Ces décharges peuvent aller de quelques heures à un service complet d'enseignement. Les bénéficiaires d'une décharge totale n'ont donc plus la responsabilité personnelle d'une classe. Cependant, parce qu'ils ont le grade d'instituteur - ou de professeur d'école - leur service hebdomadaire, comme celui de leurs collègues, est de vingt-sept heures. Qu'ils aient un rôle d'animation dans leurs écoles, c'est certain. Mais ce rôle ne prend tout son sens qu'à partir du moment où leurs adjoints ont quitté leurs classes. En revanche, si leur présence est requise au bureau à temps complet, ne serait-il pas plus judicieux de la faire assurer par une secrétaire administrative travaillant trente-neuf heures par semaine et qui opérerait sur plusieurs écoles ? Même si l'obligation de se déplacer d'une école à une autre devait être prise sur le temps de service de la secrétaire, il est certain que les économies budgétaires y trouveraient leur compte.

Et que dire des 9000 instituteurs, en 1984-85, répertoriés pudiquement par le ministère sous la rubrique "Instituteurs formateurs non chargés de classe et divers non chargés de classe pour le plus grand nombre" ? (Il est vrai, en 1989-90, que les "autres instituteurs sur postes déchargés d'enseignement"... voyaient leur nombre se réduire à 1973.) (9)

 

Gilbert Jacquet, De l'Éducation nationale, ou le bilan de santé d'une sexagénaire, Nathan pédagogie, 1995, 173 p.

 

 

Notes SH

 

(1). J. C. Barbarant (Secrétaire général du Syndicat national des instituteurs au milieu des années 80), à propos de l'éviction de René Haby Retour au texte

(2). Guy Georges, Secrétaire général du Syndicat national des instituteurs au début des années 1980  Retour au texte

(3). André Henry, Secrétaire général du Syndicat national des instituteurs vers 1975. Éphémère Ministre du Temps Libre, il est passé directement du grade d'instituteur (son passage dans l'enseignement primaire, il est vrai, avait été semblable à celui d'un météore) à celui d'inspecteur général !  Retour au texte

(4). Cf. "cette médiocrité spécifique que secrète trop souvent le syndicalisme enseignant", J. Julliard, in Le Nouvel Observateur n° 967, 20 mai 1983, p. 32. Retour au texte

(5). C'est la position que n'a cessé de soutenir le Docteur Guy Vermeil, ancien médecin-chef du service de pédiatrie de l'hôpital d'Orsay, publiant de nombreux ouvrages et articles sur le "malmenage scolaire" Retour au texte

(6). "[...] On en arrive à la conclusion que quatre heures de cours proprement dits par jour est un maximum à ne pas dépasser. Il n'est pas exagéré de dire que le dépassement de cette limite constitue une escroquerie pratiquée par les adultes aux dépens de la majorité des élèves" (A. Prost, Les Lycéens et leurs études au seuil du 21è siècle, CNDP 1983, p. 101) Retour au texte

(7). Et, tandis que nos voisins confédérés s'interrogent prudemment sur les éventuels effets d'une "scolarité précoce" à trois ans, nous sommes lancés, depuis au moins une décennie, dans la scolarisation des deux-ans. À quand la scolarisation à six mois ? cf. aussi, à propos de la prétendue capitale avance que donne en France une scolarisation précoce à deux ans, ceci : "L'effet différencié du mode de prise en charge éducative [crèche vs école maternelle] sur le développement des jeunes enfants est relativement faible : les différences entre enfants ayant bénéficié du même type d'encadrement semblent plus importantes que celles que l'on peut observer en comparant différents modes de garde" (L. Rieben, Université de Genève. In Journal de l'Enseignement primaire n° 45, août-septembre 1993, p. 7. Et puisque nous en sommes à nos voisins,  signalons cette comparaison : en Suisse romande, actuellement, la part 'maternelle' de l'enseignement primaire s'élève à 16 %. En France, elle est passée de 21 %, en 1960, à 38.6 %, aujourd'hui). Retour au texte

(8). C'est ainsi que lorsqu'un pur produit du sérail dit laïque (J. Andrieu, ancien Président de la puissante Fédération de parents d'élèves "Cornec" - créée par le S.N.I.) Ayant eu le courage de présenter au Conseil économique et social, dont il était devenu membre (toujours le système que dénonce G. Jacquet !) un Rapport sur le coût de l'échec scolaire en France, son texte fut commenté avec mépris dans les publications syndicales, tandis que le personnage lui-même était rapidement jeté aux oubliettes. Pourtant, ce rapport aurait mérité un meilleur sort, et pour le moins un examen sérieux, au lieu de l'anathème habituel (J. Andrieu, Les perspectives d'évolution des rapports de l'école et du monde économique face à la nouvelle révolution industrielle, section des affaires sociales du Conseil économique et social, octobre 1987. Ce rapport, qui insistait sur les "malfaçons redoutables" du système éducatif français, chiffrait à 100 milliards par an le coût du mauvais fonctionnement de l'école - soit environ le tiers des dépenses globales d'éducation, cette somme exorbitante ne pouvant, évidemment, prendre en compte la masse des souffrances individuelles, ou des drames intimes des victimes de l'échec scolaire). Retour au texte

(9). Il y a environ 240 000 classes primaires, mais plus de trois cent mille postes d'instituteurs. Retour au texte

 

 


 

 

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