C'était il y a… un certain temps. Le dénommé Bayrou, actuellement candidat ayant le vent en poupe, était alors ministre de l'Éducation nationale. Ministre dont les résultats furent jugés désastreux par tous ceux qui possèdent (outre un peu de mémoire) quelque connaissance du système éducatif - mais la question n'est plus d'actualité (quoi que…). Le dénommé Bayrou, ministre de l'Éducation nationale, invita les personnels placés sous son autorité à lui écrire leurs sentiments (à propos des réussites scolaires) et leurs desiderata à propos de notre système éducatif, ajoutant - sans rire ! - qu'il lirait personnellement tout ce qu'il recevrait…
Placé où j'étais, l'exercice d'écriture n'était plus une suggestion ; il devenait ardente obligation. Que ni mes pareils, ni moi-même n'envisagions d'exécuter réellement.
Alors, le chef se fâcha tout rouge, et joua au petit chef. Vous m'avez mal compris, je VEUX vos copies sur mon bureau, et avant la fin de la semaine, sinon je vais vous mettre les c... à l'envers moi ! Tous obtempérèrent, et remirent leur copie dans les temps prescrits. Tous, sauf moi. J'ai toujours adoré jouer ma petite musique à moi, sorte de contre-chant qui a souvent eu le don d'exaspérer mes supérieurs… et m'a coûté cher, mais infiniment moins que le prix que j'attache à ma liberté de penser.
À la fin de la dite semaine, cependant, j'avais rassemblé quelques documents que je comptais exploiter. Et durant le week-end tout entier, je m'enfermai devant mon ordinateur, et je me mis à rédiger. Et puis je rendis, au cours de la semaine suivante, ma copie. Elle fut immédiatement censurée, non parce qu'elle était arrivée en retard, mais à cause de son caractère politiquement incorrect (pas de vagues !) ; et elle ne quitta pas le bureau du chef (euh, la corbeille à papiers du chef, serait davantage conforme au sort injustement dévolu à ma prose). Je m'en fiche complètement : les copies de mes camarades sont peut-être (je n'en suis pas sûr) "montées" à Paris. Ont-elles été lues ? Ont-elles fait varier d'un iota l'immobilisme propre au Ministère (et pas spécialement à celui de François Bayrou, soyons juste) ? Poser la question, c'est y répondre.

J'ai retrouvé ma lettre, je l'ai relue. Je l'ai trouvée pas mal, ma foi, pour avoir été rédigée un peu à la va-vite, en un week-end. Elle est datée, certes, puisqu'elle va sur ses quinze ans - il y a donc prescription. Dès lors, je la rends publique : elle aborde de nombreux problèmes que je continue à trouver importants, et elle soulève de nombreuses questions - la scolarisation précoce en maternelle (cf. par exemple Le Monde du 30 août 2006, p. 23), entre bien d'autres - sur lesquelles peu de gens voyaient clair (si je ne me flatte pas un peu, qui le fera ?) ; je pense que ça continue, il n'y a pas de raison…

 

 

"Et le pire de tout, c'est que nous entreprenons et organisons ces choses sans seulement penser que nous recommençons l'éternelle histoire". Alain, Propos du 15 juin 1935, "le Miracle du progrès" (Pléiade, p. 1 265). [Cité par J. Vial, en exergue de son article sur les méthodes de lecture (l'Éducation nationale n° 1, 1971, p. 13)]

 

 

Ainsi notre Ministre nous propose de lui transmettre nos réflexions, dont il prendra connaissance personnellement.

Certes ! Mais Edgar Faure, en 1968, avait déjà conduit une démarche analogue : que sont toutes les réflexions d'alors devenues ?

Quoi qu'il en soit, le repérage des réussites, et plus spécialement des réussites dans le domaine lexique, exigerait au préalable une clarification des concepts, à laquelle nous ne nous livrerons pas ici ; et même cette clarification, pourtant indispensable, scotomisée, il est bien difficile de se prononcer sur une telle question.

 

I. Il est bien difficile de se prononcer sur ce sujet, car :

 

1.1. La "science" n'est pas neutre.

 

Pour ne prendre qu'un premier exemple, trivial et bien connu, on se souvient que la science expliquait, au début du siècle, que si les enfants des familles dont la mère ne travaillait pas réussissaient mieux sur le plan des études, c'est à cause de l'attention plus grande dont ils bénéficiaient, au retour de l'école. Aujourd'hui que les femmes se sont libérées - disent-elles -, la même science nous explique que les enfants dont les deux parents travaillent à l'extérieur réussissent mieux à l'école, car leur accession à l'autonomie est meilleure(1)...

Mais il convient de prendre un second exemple, plus près de nous, et extrait des travaux du fameux IREDU (Dijon), dont on fait paraît-il grand cas(2), plus particulièrement des thèses d'A. Mingat, chercheur le plus médiatique du dit Institut. Cet exemple sera double : l'effet "maternelle", et le Collège comme maillon faible du système éducatif.

 

1.1.1. L'effet "maternelle"

 

La science en général, et l'Iredu en particulier, nous expliquent doctement que quatre années de Maternelle prédisposent sûrement à une meilleure réussite en élémentaire(3). On passe sous silence un détail sans importance, savoir que cela profite d'abord aux enfants de la classe privilégiée, qui de toute manière n'ont pas besoin de l'école. Dès lors, est réduit à néant le premier argument utilisé pour le développement de l'éducation préscolaire : sa dimension compensatoire ; le système, n'est-il pas vrai, n'est pas à une contradiction près. Mais on omet aussi, soit dit en passant, de se demander pourquoi la France est le seul pays au monde à poursuivre une telle politique de la petite enfance(4). Et, tandis que nos voisins confédérés s'interrogent prudemment sur les éventuels effets d'une "scolarité précoce" à trois ans(5), nous sommes lancés, depuis au moins une décennie, dans la scolarisation des deux-ans. À quand la scolarisation à six mois ?

Or il se trouve que le même chercheur, A. Mingat, avait antérieurement publié une étude fort documentée indiquant en particulier que le nombre d'années en Maternelle n'avait aucun effet significatif sur la réussite en élémentaire(6) : les choses ont-elles changé à ce point en l'espace de cinq années ? Ou s'agit-il maintenant de justifier 'scientifiquement' le rééquilibrage du rapport des forces au sein de l'ex-FEN(7) ?

Mon sentiment est que, partout où les enfants entrent à deux ans, "ils en ont marre à cinq" comme dit l'une de mes institutrices (en élémentaire !), et leurs parents de se précipiter vers la procédure de passage anticipé - qui n'existe en principe plus.

 

1.1.2. Le Collège, maillon faible du système éducatif

 

Toujours à partir du même article du Nouvel Observateur, ma deuxième réflexion concernera le membre de phrase consacré au Collège : "c'est là qu'explose le peloton relativement bien groupé du primaire". Sur le terrain, cela conforte des opinions que j'entends trop souvent, savoir que l'école primaire travaille, et qu'on ne fiche rien en Collège. Soit.

Le premier problème du Collège, c'est que les responsabilités y sont par trop diluées, à cause du nombre de professeurs par classe(8). Mais le second problème, ce sont les élèves reçus, et leurs performances objectives !

Ainsi, en 1991, et pour ma circonscription, les 10-11 ans (750 enfants, environ) étaient ventilés sur six niveaux (CE1, CE2, CM1, CM2, Perf., 6e) ; et, en CM2, quatre classes d'âge (j'en ai eu, les années antérieures, jusqu'à six !) étaient représentées.

D'autre part, il se trouve que je me suis intéressé de près, depuis le début de l'opération, à l'évaluation effectuée à l'entrée en sixième. Examinons rapidement quelques résultats (1991), en partant des 29 écoles de ma circonscription, ayant envoyé 647 élèves de CM2 dans cinq collèges. On obtient :

Français brut : de 1 à 87 points (moyenne 53.38, σ 14.98). Cela va (en moyenne, de la meilleure à la plus "mauvaise" école), de 64.16 à 44.15...

Français normalisé : cela va de 7 à 3.5 (moyenne 5.07 sur 10, σ 2.44).

Math. brut : de 1 à 106 points (moyenne 73.72, σ 16.79). Cela va (en moyenne, de la meilleure à la plus mauvaise école), de 86.85 à 55.61...

Math. normalisé : cela va de 7 à 2.44 (moyenne 5.09 sur 10, σ 2.45).

Dans ces conditions, il me paraît difficile de parler de "peloton relativement bien groupé" ; et le Collège ne peut guère faire plus qu'il ne peut(9).

 

1.2. La science "pédagogique" est bien faiblement constituée.

 

Ainsi, pour prendre un exemple personnel, j'ai eu l'occasion d'étudier de près les résultats (en orthographe) de deux classes tenues par le même maître (dans le cadre d'un échange de service), au demeurant d'une grande rigueur et d'une compétence insoupçonnable (maître d'application émérite, il a depuis réussi le concours d'IDEN - Inspecteur départemental de l'Éducation nationale).

Envisagée selon le modèle de l'analyse de la covariance(10), la progression des deux classes s'est révélée totalement différente (d'autant que l'une des deux a légèrement régressé). Il convient donc d'être très prudent, s'agissant de l'image que l'on se fait du 'bon' maître(11).

 

1.3. La réalité des faits n'est pas unanimement attestée, et elle est davantage d'ordre 'politique' que d'ordre 'scientifique'.

 

Comment, en effet, concilier les affirmations suivantes :

 

- Plan Rouchette (1964-1971) : "Le nombre important des retards scolaires (plus de 50 % au CM2) montre, ainsi que de nombreuses études docimologiques, que les programmes actuels ne sont pas assimilés comme ils le devraient".

- Edmond Maire : "L'école est de plus en plus l'objet d'une critique fondée sur la déception devant les résultats médiocres du système scolaire. Elle ne répond pas aux besoins des milieux les plus défavorisés, elle ne motive pas les jeunes qu'elle excède même souvent, elle prépare mal à la vie professionnelle, elle sélectionne... [Il existe] une distance croissante entre l'attente des parents et l'action syndicale des enseignants(12)".

- Rapport Chevalier (1985, p. 22) : "Soixante pour cent des élèves sont actuellement éliminés à seize ans maximum".

- Loi dite Jospin : "Moins d'un élève sur deux arrive au collège avec une maîtrise suffisante de la lecture" (B.O. n° 9, octobre 1991, allusion au rapport Migeon).

- Pour ne rien dire du Rapport Carraz, parlant de "la réalité de l'échec scolaire massif"(13) ;

ni de celle-ci, Monsieur le Ministre, que vous connaissez peut-être déjà : "Non seulement l'école abandonne plus de la moitié des adolescents sur le bord de la route, mais évidemment ce sont toujours les mêmes qui tombent. Ceux qui n'ont pas de voix pour se faire entendre, ceux au nom de qui personne ne protestera, les pauvres en argent ou les pauvres en pouvoir, les pauvres en connaissance. Tout le monde est content de l'école de France. Tout le monde, ou plutôt tous ceux qui parlent. Nous savons pourquoi : c'est que leurs enfants ne sont pas atteints. L'école de France est l'école de la réussite des puissants, et comme seuls les puissants s'expriment, tout cela donne, au-delà des réserves de forme, une fort belle impression de consensus"(14).

 

avec celles-ci :

 

- "Seuls 5 % des élèves de CM1 ont de réelles difficultés de lecture"(15)

- "Neuf élèves sur dix d'une génération sont désormais admis au lycée"(16),

- Pour ne rien dire des articles régulièrement parus dans Le Monde, sous la signature de G. Courtois, s'inscrivant en faux contre l'affirmation, "martelée depuis des années par François Bayrou"(17), au sujet des faibles capacités lexiques des élèves à l'entrée en sixième.

 

1.4. La définition de la réussite suppose celle de la non-réussite, c'est-à-dire l'exigence de résultats (alors qu'on ne parle que de moyens).

 

Or, on se sert depuis toujours de précautions oratoires exonérant totalement les maîtres de leurs responsabilités ; quelques exemples :

- I.O. 1938 : "Les résultats de l'enseignement de la composition française à l'école primaire sont assez décevants [...]. Cependant les maîtres sont dévoués et compétents".

- Plan Rouchette (1964-1971) : "Il convient de ne pas fermer les yeux sur une évidence : quel que soit le dévouement des maîtres, nos ambitions ne sont pas réalisées comme elles le devraient". Et aussi : "Quels que soient les efforts des maîtres, la réussite scolaire est largement conditionnée par la maîtrise de la langue que les enfants ont acquise".

- Et il n'est pas jusqu'à notre Ministre qui ne se sente obligé d'écrire, dans sa lettre du 19 juillet dernier : "Malgré le dévouement des institutrices et des instituteurs..."

Alors, se souvenant de son Agrèg de Lettres Classiques, je souhaite qu'il m'explique la signification socio-psychologique de ce syntagme concessif, martelé tous azimuts...

 

S. H., septembre 1993

 


Notes

(1) Disparu, le stress des femmes lié à la double journée de travail...
(2) Songeons au rapport sur les GAPP soi-disant "explosif" (dixit Le Monde de l'Éducation de décembre 1990, p. 52). Malheureusement, ceux qui connaissent quelque chose sur le sujet savent que tout, ou à peu près, avait été dit au moins quinze ans auparavant, en particulier du côté du CRESAS (Cf., entre autres, Recherches pédagogiques n° 87, 1976, Introduction).
(3) Cf. par exemple l'article publié dans le Nouvel Observateur du 27 mai 1992, qui popularise cette thèse. Mais aussi Le Monde de l'Éducation, la RFP, etc.
Pour ceux qui voient quotidiennement le travail en général effectué en Petite Section, et l'effarant absentéisme qu'on y constate de toute façon, il y a dans une telle affirmation cuistre un réel sujet de franche rigolade.
(4) Cf. par exemple le graphique éclairant publié dans l'École libératrice n° 14 du 5 janvier 1985, p. 17.
On s'interrogera alors sur l'origine réelle de la montée en charge des maternelles, parallèle au glissement progressif de trois classes d'âge (11-14 ans) de l'école élémentaire vers le collège, à partir de la réforme Berthoin.
Et on comprendra aisément l'incroyable levée de boucliers qui accueillit, en 1974, le projet Lesur (du nom d'une secrétaire d'État du Ministère Haby), lequel proposait de confier les deux-quatre ans à des aides-éducatrices.
(5) "L'effet différencié du mode de prise en charge éducative [crèche vs école maternelle] sur le développement des jeunes enfants est relativement faible : les différences entre enfants ayant bénéficié du même type d'encadrement semblent plus importantes que celles que l'on peut observer en comparant différents modes de garde" (L. Rieben, Université de Genève. In Journal de l'Enseignement primaire n° 45, août-septembre 1993, p. 7.
Et puisque nous en sommes à nos voisins confédérés, nous signalons cette comparaison : en Suisse romande, actuellement, la part 'maternelle' de l'enseignement primaire s'élève à 16 %. En France, elle est passée de 21 %, en 1960, à 38.6 %, aujourd'hui).
(6) S'agissant de l'entrée à deux ou à trois ans. Revue française de pédagogie, (n° 69, 1984) "Les acquisitions scolaires de l'élève au CP : l'origine des différences". Cf. en particulier p. 56 de la revue. L'auteur se place dans le cadre d'une ZEP.
(7) Dont on sait que la volonté de puissance n'a nullement cessé avec la chute de la "forteresse enseignante".
(8) La bi-valence, heureuse idée pédagogique, n'a guère été appliquée naguère, et a complètement disparu aujourd'hui.
(9) On ajoutera que si l'ensemble des élèves envoyés en SES/SEGPA obtient des résultats très inférieurs à la moyenne générale, il est curieux de constater que, individuellement, nombre d'élèves de cette section obtiennent des scores supérieurs à nombre d'élèves des classes "ordinaires", qui n'avaient même pas été signalés pour une éventuelle entrée en section d'éducation spécialisée. Et cette constatation corrobore la remarque de L. Legrand à propos de la manière dont étaient constituées, jadis, les classes de Transition. (Cf. L. Legrand, Pour une politique démocratique de l'éducation, P.U.F, 1977, 295 p.).
(10) Outil statistique qui tient compte des performances initiales, c'est-à-dire a pour ambition de mesurer l'effet de "valeur ajoutée".
(11) Les données réelles (notes normalisées, sur dix) sont les suivantes :

Classe 1 22 4.41 2.10 4.86 1.97
Classe 2 17 5.24 2.12 4.55 1.94


[Exemple de lecture. La moyenne de la classe 1 (22 élèves) fut de 4.41 (écart-type 2.10) au prétest, et de 4.86 (écart-type 1.97) au post-test]. Le T de Student entre les deux classes est de 2.77 (.01).
C'est pourquoi certains auteurs (Cf. par exemple J.M. Faverge, in Méthodes statistiques en psychologie appliquée, P.U.F, 7e édition 1975, tome II, p. 273), me paraissent énoncer des opinions un peu trop abruptes, s'agissant de l'influence de l'enseignant sur les résultats obtenus par les élèves.
(12) Conférence de presse du secrétaire général de la C.F.D.T., début novembre 1979. D'après Le Monde du 8 XI 1979.
(13) R. Carraz (alors Député P.S. - Chevènementiste - de la Côte d'Or), Recherche en éducation et socialisation de l'enfant (rapport de mission au Ministre de l'Industrie et de la Recherche), La Documentation française, nov. 1983, p. 52.
(14) François Bayrou, La décennie des mal-appris - 1990-2000, Flammarion, 1990, pp. 61-62.
(15) Rapport Thélot, octobre 1992.
Ce n'est pas le lieu de discuter ici du "niveau [qui] monte" (Alain Finkielkraut a écrit une courte et définitive mise à sac du fameux ouvrage de Beaudelot-Establet). Ni de rappeler que les comparaisons internationales nous sont effectivement assez favorables, ce qui était déjà le cas il y a trente ans (Cf. les travaux de Torsten Husén au sein du groupe Aspen). En tout état de cause, la plupart des zélateurs du niveau qui monte se réfèrent à des données telles que celles-ci :

- Réussite globale au baccalauréat session 1973 : 65, 3 %
- Réussite globale au baccalauréat session 1993 : 72 %
Ils feraient bien de se demander s'il n'y a pas, surtout, manipulation de barèmes.

C'est pourquoi nous nous bornerons à extraire d'un document distribué au cours d'une de nos conférences pédagogiques (octobre 1988) ceci :

"... Une étude objective (réalisée dans le Collège grenoblois Berlioz) des performances lexiques obtenues par la cohorte 6e à la rentrée de septembre 88 montre que 49 % des élèves n'atteignent pas le seuil minimal de vitesse de lecture, tandis que 62 % ne parviennent pas à la catégorie médiane en efficacité" (la notion de vitesse minimale de lecture comme seuil de la compréhension reprend les recherches effectuées en mars 1977 par J. Foucambert et publiées en juin 1979 sous le titre : "Évaluation comparée de quatre types d'organisation à l'école élémentaire", INRP.).
Puis nous reprendrons à notre compte l'opinion d'A. Carignon au sujet du rapport Thélot : Il s'agit d'"un chapelet d'informations rassurantes [s'inscrivant] dans la grande tradition soviétique du trucage statistique" (d'après Le Monde de l'Éducation, novembre 1992, p. 8).

Enfin, nous produirons les données suivantes émanant d'un collège particulièrement huppé, Sainte Amélie (nommé Collège 1 ci-dessous). Tous les élèves entrant en 6e sont soumis à des tests lexiques fiables, produits et distribués par les services locaux d'Orientation. Ces tests sont gradués de 0 à 10 ; on comprendra sans longue démonstration, que les résultats inférieurs à 4 sont le fait d'élèves possédant un niveau très médiocre, préjudiciable à la poursuite heureuse des études en Collège. Or, à Sainte Amélie, en dépit du milieu socio-professionnel particulièrement porteur, les niveaux 0 à 3 inclus recueillaient successivement :

- 14 % des élèves accueillis à la rentrée 1986
- 17 % des élèves accueillis à la rentrée 1987
- 19 % des élèves accueillis à la rentrée 1988
- 23 % des élèves accueillis à la rentrée 1989

Peut-on, dans ces conditions, affirmer que ces données ne sont pas préoccupantes, si l'on ajoute, comme on va le voir infra, qu'il s'agit du "meilleur" collège de la circonscription ?
(16) B.O. n° 11, 1993, Rénovation pédagogique des lycées. Ce qui paraît pour le moins curieux quand on sait, pour ne prendre en compte qu'un palier, que 75 % seulement des élèves de 5e accèdent en quatrième générale (Sce : MEN-DEP, 1992-93).
(17) "Les mauvais comptes de l'illettrisme", Le Monde du 6 mai 1993, p. 13. Gérard Courtois ferait bien de feuilleter une collection de ce quotidien. Il y trouverait par exemple le chiffrage (100 milliards par an, soit environ le tiers des dépenses étatiques d'éducation à cette époque), par le Conseil économique et social du coût du mauvais fonctionnement de l'école. Cf. Le Monde du 14 octobre 1987 et J. Andrieu, "Les perspectives d'évolution des rapports de l'école et du monde économique face à la nouvelle révolution industrielle", section des affaires sociales du Conseil économique et social.
Ce rapport, qui insiste sur les "malfaçons redoutables" du système éducatif français, parle surtout d'échec à l'école. Nous n'hésiterons pas, pour ce qui nous concerne, à parler d'échec de l'école.

 

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