La revue L'Éducation Nationale (aujourd'hui disparue) avait publié, dans sa livraison de fin décembre 1959, un article portant sur l'étude d'une cohorte d'élèves d'école élémentaire en âge d'entrer en classe de sixième. Cette étude était précédée d'une précaution oratoire de la part de la Rédaction de la revue ("L'enquête de Mme Marcelle Bidault, institutrice, a été menée dans la région d'Orléans... Bien entendu, on ne peut tirer des conclusions générales de statistiques établies sur le plan local, mais le problème est d'importance, et l'article ci-dessous donne des renseignements fort utiles pour les maîtres") dont on comprend, d'ailleurs, assez mal la conclusion (car quels "renseignements fort utiles" les maîtres d'école étaient censés y trouver ? Pas s'agissant de leur pratique pédagogique, en tout cas).
Ce travail, on a tenté de le résumer dans la première partie de la mise en ligne qui suit. Deux mois plus tard, l'étude en question subit, en réponse, un examen critique assez sévère, qui est reproduit in extenso dans la seconde partie.
Je serais navré qu'on puisse interpréter cette réponse comme une leçon infligée par quelqu'un de remarquablement instruit (Administrateur civil au Ministère de l’Éducation Nationale, classe sociale IV) à une personne nécessairement moins instruite (institutrice, classe sociale III). Mais bon...

 

 

I. Étude d'une cohorte issue d'une circonscription d'inspection primaire (Loiret)

 

"À la lecture des journaux pédagogiques et de nombreux articles qui traitent des problèmes de l'enseignement, écrivait l'auteur, il semble qu'une des préoccupations actuelles soit née de la constatation suivante : peu d'enfants issus des milieux modestes parviennent aux études universitaires, et même à la consécration des études secondaires : le baccalauréat. 

Il est nécessaire que nous ne laissions pas nos élites en puissance se gaspiller, faute d'avoir eu au départ leurs chances de se former, de s'affirmer. Et les auteurs des articles écrits sur cette question, après avoir fait état des statistiques de l'enseignement supérieur et de l'enseignement secondaire, concluent, un peu témérairement selon moi, soit à une négligence des maîtres de l'enseignement primaire qui n'ont pas usé de toute leur persuasion auprès des familles pour donner à tous les enfants qui le méritent une possibilité de faire des études, soit à un rapport direct entre les faibles moyens pécuniaires des familles ouvrières et paysannes et le maintien de leurs enfants dans les classes primaires".

Elle proposait donc aux maîtres de CM2 de la circonscription de renseigner un questionnaire sur chacun de leurs élèves, questionnaire au sein duquel les "origines sociales" occupaient une part capitale :

Classe sociale I : Sans qualification - manœuvre, ouvrier non qualifié, domestique, femme de ménage, journalier, ouvrier agricole, petit agriculteur, etc.
Classe sociale II : Ouvriers qualifiés, petit employé, vendeur, petit fonctionnaire et assimilé (cantonnier, gendarme, emploi subalterne dans S.N.C.F., P.T.T., etc.), petit artisan, petit commerçant, agriculteur ayant une exploitation moyenne, etc.
Classe sociale III : Cadres moyens : contremaître, directeur de travaux, fonctionnaire moyen (instituteur, professeur non agrégé, etc.), technicien, artisan et commerçant dirigeant du personnel, agriculteur ayant une grosse exploitation avec nombreux personnel.
Classe sociale IV : Cadres supérieurs - industriel, directeur d'entreprise industrielle ou commerciale, profession libérale, haut fonctionnaire (professeur agrégé, directeur ou inspecteur de service important), ingénieur, technicien supérieur, propriétaire vivant aisément de ses revenus.

 

Et elle synthétisait ainsi sa propre opinion, qu'elle estimait elle-même "un peu hasardeuse, parce que subjective" :

- le niveau intellectuel d'un enfant est le plus souvent en rapport avec le niveau social (je ne dis pas financier) de la famille ;

- à la campagne, il y a peu de très bons élèves qui ne continuent pas leurs études ; à la ville, il y en a encore moins ;

- un système de bourses mieux adapté permettrait sans doute de sauver les rares bons élèves qui restent à l'école primaire. Mais le gain serait probablement faible.

Ce qui expliquait l'enquête qu'elle avait conduite, puis synthétisée dans son article : "Il  m'a semblé utile, plutôt que de tirer des conclusions pessimistes à la sortie des études secondaires ou universitaires, de chercher les causes à la source, au moment où nos élèves devraient être  dirigés vers la 6e. S'interroger sur ceux qui entrent effectivement fausse déjà les données. C'est donc auprès des maîtres de CM2 et des septièmes que j'ai cherché des éléments d'information [à partir de questionnaires remplis par les maîtres]". Et elle ne cachait pas que "l'appréciation portée sur l'élève... est le point faible de mon questionnaire", puisqu'il s'agissait de demander à ses collègues de CM2 "une appréciation sur les qualités d'intelligence et de travail" de leurs élèves. Mais comment parvenir à remplir utilement ce questionnaire, sans aucune référence commune à tous les maîtres - sans même ce que M. Boret nomme péréquation des notes, dans sa réponse ?
Notre institutrice escamotait cette réelle difficulté, ce biais, par une curieuse pirouette : "J'espère que la multiplicité des réponses reçues permettra aux compensations de jouer" [sic]...
Enfin, sa conclusion était par trop tranchée, ce qui devait soulever l'ire de son lecteur-contradicteur : "Nous voyons donc, à mesure qu'on s'élève dans l'échelle sociale, les sommets des courbes se déplacer vers une meilleure qualité de recrutement, le rapport allant de 1 à 8 pour les TB de la classe I à la classe IV, ce qui est considérable".
D'autant qu'elle l'assortit de surprenantes considérations : "Ce n'est pas en premier lieu parce que les enfants des classes sociales modestes sont gênés par des contingences matérielles, qu'ils atteignent en petit nombre le sommet des études, c'est surtout parce qu'on trouve dans ces catégories relativement peu d'élèves capables de les suivre [souligné par moi]"(1).

 

II. Examen critique de l'étude précédente

 

 

"L'inégalité d'instruction est une des principales sources de la tyrannie"

Condorcet.

 

Dans le n° 37 du 17 décembre 1959 de L'Éducation Nationale a paru un article sur "L'origine sociale des élèves entrant en 6e" qui appelle à notre sens plusieurs observations critiques.

L'auteur part de l'idée, confirmée par son expérience vécue dans les classes primaires rurales et urbaines, que le petit nombre d'enfants issus des classes sociales inférieures et qui parviennent à l'enseignement secondaire ou supérieur est inhérent à une sorte de loi de nature, à cette biologie sociale qui préside à la répartition des intelligences selon les classes sociales existantes, que les enfants doués ne se trouvent en majorité que dans les classes sociales supérieures, les enfants de faible niveau intellectuel prédominant dans les classes sociales défavorisées. De sorte qu'en fait, "il y a peu de très bons élèves qui ne continuent pas leurs études". Les intelligences étant somme toute héréditaires, les jeux sont faits à 11 ans, d'après, grosso modo, la situation sociale des parents. Il n'y a pas à proprement parler injustice sociale. Il y a inégalité fondamentale au départ. La société, par son système d'enseignement, ne peut que la consacrer.

Sur ces notions théoriques de base, il a été procédé à une enquête statistique portant sur 676 élèves de CM2 dont 623 sont entrés en 6e, qui ont été classés doublement, suivant 5 niveaux d'intelligence (TB-B-AB-M-Méd.)(2) et suivant 4 classes sociales d'appartenance (classes I-II-III-IV correspondant, I  : aux manœuvres, ouvriers sans qualification ; II : aux ouvriers qualifiés et petits employés ; III : aux cadres moyens ; IV : aux cadres supérieurs) suivant, à peu près, la distinction américaine des lower-class (classes inférieures), working-class (classes ouvrières), lower-middle-class (classes moyennes inférieures), upper-middle-class et upper-class (classes moyennes supérieures et classes dirigeantes), enquête qui confirme "l'hypothèse de travail" et lui donne une sorte de valeur illustrante.

Rassemblés dans un tableau à double entrée, les effectifs des élèves entrés en 6e ainsi distingués et convertis en pourcentages par rapport au contingent total d'enfants de la classe sociale représentée aboutissent au tableau qui est la synthèse de l'enquête.

 

   I  II  III  IV
         
 TB.

4,16

6,74

11,88

 32,60
 B.

33,88

33,14

43,06

32,60
AB.

40,27

44,38

30,69

 26,09
 Moy.

12,5

12,3

8,91

 8,69
 Méd.

2,77

3,45

5,44

 0

 

 

Deux constatations sont alors formulées, auxquelles on semble donner valeur de lois générales :

1° À mesure qu'on s'élève dans l'échelle sociale des familles, on obtient une meilleure qualité de recrutement, le rapport allant de 1 à 8 pour les TB de la classe 1 à la classe IV, ce qui est considérable ;

2° C'est la classe I qui a le plus grand pourcentage de M, la classe II de AB, la classe III de B, la classe IV de TB, de sorte que chaque fois qu'on passe d'une classe sociale à l'autre, on s'élève d'un degré dans la hiérarchie des intelligences appréciées quant à leur plus grand nombre au même niveau.

Ainsi, est-il conclu, "les statistiques établissent que peu d'enfants des classes sociales modestes obtiennent le baccalauréat ou des diplômes universitaires, ou l'entrée dans les grandes écoles". Ce n'est pas parce que les enfants de ces classes sociales sont gênés par des contingences  matérielles qu'ils atteignent en petit nombre le sommet des études, c'est surtout parce qu'on trouve dans ces catégories peu d'élèves capables de les suivre.

De tels jugements formulés d'une manière aussi générale apparaissent très discutables.

Comment, en effet, des statistiques, portant sur un échantillonnage somme toute très restreint et très particulier, et concernant seulement 676 élèves, peuvent-elles être estimées suffisantes pour avoir une valeur probante sur le plan national, et peut-on tirer des conclusions aussi nettes et de portée aussi décisive ?

Une enquête qui n'est qu'une monographie restreinte, dans un milieu très spécial, comportant un large secteur rural, peut difficilement prêter à une telle généralisation.

Aussi bien, tant la méthode utilisée que l'interprétation des données nous paraissent critiquables.

En premier lieu, quelle valeur objective peut avoir une répartition des intelligences selon le propre jugement des différents maîtres, purement subjectif, et sans péréquation des notes, jugement établi au surplus, non seulement sur les aptitudes actuelles des enfants mais plutôt de celles-ci considérées comme un gage sûr de poursuivre des études avec fruit. Est noté TB par exemple, celui qu'on estime, à 11 ans, capable d'accéder aux études universitaires, alors qu'à cet âge toutes les aptitudes ne sont pas encore révélées. Il nous semble qu'un tel système de notation apparaît pour le moins téméraire, au point de vue de l'appréciation des qualités intellectuelles, et qu'on peut se demander si elle ne reste pas entachée malgré soi des considérations sur le genre de vie de la famille de l'enfant dont le maître ne peut s'abstraire, à juste titre d'ailleurs ; car la supputation des chances que peut avoir un élève de 11 ans de poursuivre des études supérieures reste, dans les circonstances présentes, liée nécessairement au niveau de vie des parents.

De sorte que la démonstration recherchée repose en fait sur des prémisses qui contiennent les termes de celle-ci et aboutit au développement d'une sorte d'évidence, à savoir que ceux qui peuvent le mieux envisager de faire des études supérieures sont ceux des enfants de 11 ans qui, dans la forme actuelle de la société française, appartiennent précisément aux classes sociales élevées.

À ce sujet, il convient de rappeler qu'une enquête nationale dans les classes de CM2 a été faite par l'Institut national d'étude du travail et d'orientation professionnelle (I.N.O.P.) en 1957(3), portant sur 4 860 élèves de 397 écoles, choisies de façon à constituer un échantillon représentatif de l'ensemble des écoles primaires publiques françaises. Cette enquête, dont l'objet était "l'état des connaissances et la candidature à l'entrée en 6e", débute par un examen préliminaire des jugements portés par les maîtres. "II est bien certain, dit le rapporteur, que personne mieux que l'instituteur ne sait quel est l'état des connaissances de chacun de ses élèves, lequel hésite encore sur l'accord des participes, lequel a maîtrisé les additions de fractions... Mais la difficulté apparaît lorsque cet état des connaissances doit être jugé, c'est-à-dire apprécié relativement aux résultats habituellement acquis à cet âge. Il n'est pas possible, en effet, sans enquête systématique, d'avoir une notion un peu précise des acquisitions dans la population générale. Or, c'est seulement par rapport à ces acquisitions que telle lacune particulière peut être considérée ou non comme grave, tel élève particulier comme Très Bon, Bon, Moyen ou Médiocre.

"Les appréciations portées par les maîtres sur les connaissances des élèves manquent d'une base commune d'appréciation, le même niveau des connaissances pouvant être qualifié indifféremment de TB, B, M, voire Médiocre. Les divergences peuvent s'expliquer en partie par des facteurs systématiques. D'où la nécessité de fournir un étalon commun à l'ensemble des instituteurs appelés à porter un jugement sur leurs élèves en vue de l'entrée en 6e. Cette base d'appréciation ne peut être qu'un tableau des connaissances acquises au CM2 par une large population".

Et l'enquête conclut par ces chiffres particulièrement éloquents : "20 élèves environ sur 100, dans les classes considérées (CM2), ont des connaissances égales à celles des élèves admis en 6e et ne sont pas candidats alors que 25 élèves environ sur 100, dans ces mêmes classes, sont des candidats ayant les connaissances requises pour l'admission. Le quart des "non-candidats qui pourraient l'être" témoigne de connaissances égales ou supérieures à celles du candidat moyen.

"Au surplus, une étude plus analytique de ces données fait intervenir un ensemble de caractères démographiques et économiques des localités : le niveau général des connaissances, le pourcentage des élèves candidats à la 6e et le niveau des connaissances de ces candidats augmentent tous trois lorsqu'on passe des localités rurales aux localités urbaines".

Par ailleurs, l'I.N.E.D. (Institut national d'études démographiques), (cahier n° 13) a publié une brochure, Le niveau intellectuel des enfants d'âge scolaire qui, cherchant à dégager les influences du milieu sur la valeur de l'intelligence scolaire de l'enfant, montre que celle-ci varie par exemple avec l'appartenance au milieu rural ou au milieu citadin, suivant la dimension de la famille et le nombre des enfants, et souligne également que les structures mêmes des échelles de tests favorisent les écoles des villes : "dans un même ordre d'idées, on a montré que si l'on étalonne d'abord une échelle de tests sur des ruraux en tenant compte de leurs aptitudes, ce sont les citadins qui donnent, par suite, les résultats les moins bons".

Ces deux études montrent que les bases de l'enquête effectuée dans un milieu comportant un large secteur rural, et qui ignore tous ces facteurs du milieu, autres que ceux de la classe sociale d'appartenance, aboutit en éliminant leurs influences profondes, à un schéma trompeur dans sa signification et qui par suite, fausse la valeur même des conclusions qui en sont tirées.

Au surplus, même avec une méthode d'enquête aussi simplifiée et discutable que celle adoptée, on peut déduire des conclusions différentes.

Reprenons le tableau de synthèse et considérons les 3 classes sociales I, II, III, réservant la classe IV, laquelle joue un rôle prédominant dans la société et dont la préoccupation d'assurer, coûte que coûte, un enseignement supérieur à ses enfants a déjà par elle-même une signification particulière, en tant que cet enseignement est déjà ce qui classe, et groupons les AB et les B, les M et les médiocres ensemble ; un tel regroupement est raisonnable, compte tenu de la méthode grossière d'appréciation et des possibilités de divergences dans les jugements des maîtres dont les écarts se trouvent compensés, dès lors qu'on rassemble les résultats, sur des critères moins discriminatoires, le raffinement de l'analyse devant s'assortir nécessairement de moyens d'évaluation eux-mêmes distingués avec une extrême délicatesse.

On aperçoit alors :

- que les taux B-AB pour les 3 classes I, II, III, sont respectivement : 79,15 %, 72,52 %, 73,75 %, comparables et de même ordre de grandeur, les différences étant trop peu marquantes pour être significatives sur des effectifs assez réduits ;

- que les taux M-Médiocre sont également de : 15, 27 %, 15,75 %, 14,35 %, c'est-à-dire sensiblement équivalents.

On peut vraisemblablement dire que, sur la base assez grossière de l'enquête, aux niveaux des intelligences moyennes, la répartition des intelligences des enfants de 11 ans du CM2 ne présente pas de différences notables, suivant les 3 classes sociales considérées.

Sans doute, la classe sociale supérieure (cl. IV) présente un taux très fort de TB, en disproportion avec ceux des autres catégories sociales. C'est la constatation d'un fait patent, à savoir la plus grande réussite aux examens scolaires à l'âge de 11 ans (examens du CM2 ou d'entrée en 6e) des enfants de ces classes sociales. Si l'on peut, dans une certaine mesure, penser à une prééminence de l'intelligence naturelle de ces enfants, et c'est là une question controversée, on peut également et légitimement estimer que les enfants des autres classes sociales souffrent, au départ, d'un handicap certain, de nature complexe, à la fois social, familial et géographique, que les études de milieu ont révélé, mais qui pourrait être surmonté si les enfants étaient précisément admis à poursuivre leurs études. "Le handicap dont souffre à 11 ans un enfant d'ouvrier  est temporaire ; il s'agit d'un retard, non d'une infériorité fondamentale". (A. Sauvy.)

Une telle opinion, sans doute, a l'allure d'un pari sur une structure future, précisément sur une réforme des structures pédagogiques actuelles qui permet d'entrevoir la démocratisation de l'enseignement comme une réalisation non seulement souhaitable, mais possible et qui trouve notamment son fondement dans le sentiment qu'on doit substituer la notion d'aptitude toujours perfectible aux "consécrations"» définitives et aux classements ne varietur de concours. L'enquête précitée de l'I.NO.P. a évalué en 1957 à 100 000 l'ordre de grandeur du nombre des enfants qui ont des connaissances au moins égales à celles des élève admis en 6e qui ne sont pas candidats, et que le tiers d'entre eux ont des connaissances supérieures à celles du candidat moyen.

C'est dire que si la démocratisation très limitée de l'enseignement, entreprise au cours des dernières années, a touché effectivement les éléments modestes des classes moyennes, une démocratisation plus large atteindrait certainement les couches ouvrières et paysannes.

L'enquête de Mme Marcelle Bidault, institutrice, a été menée dans la région d'Orléans où elle est également secrétaire du B. U. I. C.
Bien entendu, on ne peut tirer des conclusions générales de statistiques établies sur le plan local, mais le problème est d'importance, et l'article ci-dessous donne des renseignements fort utiles pour les maîtres.

 

Notes

(1) Mon expérience me suggère qu'un tel jugement était largement partagé par les maîtres de l'école élémentaire (je ne préjuge nullement de l'opinion des milieux "secondaires"), témoin cette réflexion d’un collègue d’Orléans, parue dans le Courrier des lecteurs de la même revue [Je rappelle que nous sommes en juin 1958]. "Fort intéressé par les résultats de ‘l'enquête I.N.O.P.’, mais en en contestant la valeur", il avançait les remarques suivantes :
1° Il est extrêmement rare qu'un élève vraiment doué ne continue pas ses études secondaires, les bourses palliant les difficultés matérielles.
2° Il semble que le niveau de connaissances exigées soit beaucoup trop faible. Ainsi, les enfants classés dans le groupe 'non-candidats supérieurs' seraient sans doute loin de devenir tous bacheliers.
Exerçant depuis de longues années dans un CM2, je présente en 6e les meilleurs élèves ; les autres seraient incapables de suivre avec profit l'enseignement secondaire. Mais peut-être auraient-ils été classés dans la catégorie 'non-candidats supérieurs’ si on leur avait proposé des exercices simples.
3° Il faut se souvenir qu'il y a un déchet de 70 % pour les élèves admis en classique, que dans les sections modernes, au baccalauréat 1e partie, on enregistre 45 % d’échecs. Donc, trop d'élèves entament des études secondaires sans beaucoup de chances de succès ! Aussi les conclusions de l'enquête me paraissent-elles peu valables
."

[Combien de fois ai-je entendu, dans mon jeune temps, les instituteurs sont de gauche, oui mais seulement à partir de quatre heures et demie... Et parfois, on se sent irrésistiblement poussé à prononcer : "Sutor, ne supra crepidam"…]
(2) Très bien - Bien - Assez bien - Moyen - Médiocre.
(3) Enquête publiée au B.I.NO.P. en 1958, et à retrouver éventuellement sous ce lien.

 

© Marcel Boret, in l’Éducation nationale n° 6, 11 février 1960

 


 

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