Oculos habent, et non videbunt

"Il faut toujours dire ce que l'on voit ; surtout, il faut toujours, ce qui est plus difficile, voir ce que l'on voit". (Charles Péguy)

 

Il me faut le confesser : je n'ai pas grande estime - le mot est faible - pour Darmanin, ce petit Monsieur, bien petit, qui sut naguère profiter de sa position d'autorité (de Maire) pour abuser de la détresse de jeunes femmes. Mais je n'en suis que plus à l'aise pour applaudir des deux mains lorsqu'il en est venu, récemment, à fustiger le comportement de la Nupes, qui "ne cherche qu’à bordéliser le pays", stigmatisant au passage le  "gauchisme paresse et bobo".

Dans un registre de langue plus soutenu, je lisais récemment un article (d'Olivier Babeau) trouvant "consternant" le fonctionnement syndical en France. Le qualifiant "consternant" est cependant bien insuffisant, à mon avis ! Et j'écoutais dimanche dernier, il me semble sur RTL, la prestation du gars de la CFDT, Laurent Berger, qu'on dit plus intelligent que "les autres". Eh bien, qu'est-ce que ça doit être, "les autres" ! Et comment ne pas être consterné devant les récentes manifestations de rues, qui nous proposent un nouvel exemple de leur comportement de "mobilisation" (moi qui sors rarement de chez moi, je me souviens d'avoir été pris, à mon corps défendant, au milieu de "manifestations" contre la loi El-Komri : quel spectacle lamentable). Et quand on songe que les syndicats, ultra-minoritaires dans le monde du travail (on parle de 8 % d'adhérents) se servent de leur folie de blocages comme d'un cache-misère (cela se nomme du terrorisme en toute impunité) ; et que la démagogie syndicale est nourrie des subventions de l’État (achat de la paix sociale, toujours) ! Pourquoi se gêner, dès lors ? Voici une dizaine d'années, le député  N. Perruchot avait produit un rapport parlementaire sur la réalité du syndicalisme français, tellement différent du sérieux responsable de ses homologues européens, ceux d'Allemagne en tête. Un rapport de plus à la trappe !

Puis-je me permettre de rappeler que cette "lamentable" autant que coûteuse démagogie est née en juin 36, lorsqu'on a cru avec Blum (avec nombre de ses ministres plutôt, car lui était relativement clairvoyant) que désormais, on allait raser gratis ? Et ce furent et le début de la litanie des congés payés (payés par qui ?) et l'invention des comités d'entreprise, permettant pour l'essentiel à des braillards incompétents, souvent fainéants, et toujours protégés par la loi, de donner leur avis sur des sujets qui les dépassaient très largement. Ceci pour le monde de l'entreprise. Et le même système fut introduit, par copier-coller, dans la fonction publique (ah, la cogestion !). Avec les beaux fruits que l'on voit, qui indignent nombre de pays voisins (lesquels nous manifestent leur mépris, ce qui est encore pire). Le résultat, en 36 ? Mais l'incroyable déroute des finances (comme en 81, relisez ce que Rocard a écrit à ce sujet), et l'impréparation à la guerre qui n'allait pas tarder ! Sans oublier, naturellement, le vote des pleins pouvoirs à Pétain...

Et je reviens à mon propos puisque j'ai parlé de 81. La démagogie a marché à plein - là encore, passant de l'ombre à la lumière, on allait raser gratis ! - en particulier en faisant reculer l'âge de la retraite de 65 à 60 ans : qui allait payer ? Mais la dette, pour les générations à venir, bien sûr.

Les pays alentour nous regardent, consternés ou méprisants, c'est selon. Quand on songe qu'en Italie, ils en sont à 67 ans (et les autres n'en sont pas loin) on se demande, objectivement, si le travail est plus difficile, plus pénible en France (avec, de plus, un Droit du travail absolument délirant à force d'être pléthorique) qu'à l'étranger. Aussi, la réforme se fera, parce qu'elle est inéluctable ; et elle sera bien plus cruelle, plus tard. La "rue" avait réussi à faire remiser les projets Juppé. Mais quelle réussite ! Cela prouve dès l'abord que la gauche n'est démocrate que lorsqu'elle est au pouvoir : elle n'accepte pas le verdict des urnes, quand il lui est contraire.

Au vrai, je me demande s'il ne faudra pas en venir à abandonner le sacro-saint principe de répartition, pour passer à la capitalisation. Mot grossier, sans doute, mais qui aurait l'éminent avantage de faire des Français des êtres un peu moins "assujettis" qu'ils ne le sont actuellement. Car redisons-le, la réalité est en effet cruelle : en 1960, on comptait 4, 29 actifs pour un retraité. En 2020, on trouve 16,9 millions de retraités, pour 28,2 millions de cotisants : le ratio est passé à 1, 68. Ce n'est pas difficile à comprendre. Sauf pour les têtes dures qui ont imaginé, imprimé puis fait placarder le libelle que j'ai lu tout à l'heure (sur un endroit interdit à l'affichage) : "Contre l'inflation : augmentation des salaires". Sacrés économistes !

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