Tèn odón étrèpsamen

 

Fragments d'un journal de voyage - Pour Xavier, Willy le Flamand et Roger de Saint-Étienne, Jean et Monique, tant d'autres encore...

 

"Je ne suis pas un extraordinaire marcheur. Je marche. C'est déjà quelque chose ; et, comme je le fais pour prendre du plaisir, il est rare que j'aille au bout de ma fatigue. Dès que ma jambe s'alourdit, je regarde un peu plus vivement devant moi, en quête d'une halte, d'une vraie halte, celle où, de haut en bas, se délasse le corps et où je puisse, moi, manger, boire, soupirer d'aise et même me dire : Ma foi ! je coucherai là s'il le faut. Il y fait bon". (Henri BOSCO, Un rameau de la nuit, 1950).

 

 

 

5e jour - Mercredi 30 août Aumont-Aubrac-Aubrac 30 km

 

Temps détestable, on serait bien mieux à l'intérieur ; mais le pèlerin doit poursuivre, quelques intempéries qu'il rencontre. Et je me trompe dès le départ, il faut le faire. À ma décharge, l'orage nocturne a laissé en se retirant froid et brouillard. On ne voit pas à dix pas. Et il y a même un peu de neige fraîche ! Alors que je passe tout près d'une autoroute, je sens que je me perds. Je sors ma boussole, mais, bon, pour la forme, comme pour me rassurer, car je n'ai rien dans ces étendues mornes que je devine dans la brume pour accrocher un quelconque point d'appui.

 

Ah ! J'en ai fait des boucles et des boucles, et des retours en arrière, pour essayer de me situer !

 

 

 

 

Et pas un pèlerin pour me montrer le chemin ! Il est vrai que je suis parti bien avant tous les autres : avantages et inconvénients de cheminer en solitaire... C'est dans ces sortes de moments-là, je pense, qu'on peut vraiment juger de ce qu'on a au fond des tripes. Car on est vraiment nu, à la limite du désespoir, et on a beau essayer de se réciter un cours sur la phonétique et la phonologie, ça ne nourrit pas son homme de certitudes. Le seul point de repère, ce sont les bovidés, et encore les bovidés. Bon sang, on n'est tout de même pas sur le plateau de Millevaches, ou alors je suis vraiment perdu corps et biens !

Certains pèlerins croyants auraient peut-être tenté une vague prière. Moi, j'avoue simplement que je n'en ai pas mené large, pendant vingt bonnes minutes. Et quand j'ai, enfin, retrouvé mon chemin, je crois que je me serais tiré deux gifles, si mes mains n'avaient été presque complètement engourdies...

À huit heures quarante-cinq très exactement, j'aborde la Chaze de Peyre. Des bœufs et des vaches menaçants arrivent sur moi, en quantité industrielle ! Et impossible de m'échapper, je suis entre deux rangées de barbelés. Nous nous faisons face : longue minute ! Heureusement j'entends un 4×4, c'est l'éleveur qui pousse ses bêtes avec sa voiture ! Et ça ne traîne pas ! Ouf, malgré le froid, j'ai senti sur mon visage perler des gouttes de transpiration ! Un peu plus loin, ce sont quatre chiens errants qui viennent me menacer, sans trop de conviction d'ailleurs, car quelques moulinets de mon bâton suffisent à les éloigner. Et vers onze heures, c'en est trop, me voilà empêtré, pour je ne sais quelles raisons, dans des barbelés ! Morne paysage, morne jusqu'à l'hostilité, et tant de pèlerins m'ont raconté depuis qu'ils l'avaient traversé, à d'autres périodes de l'année, sous les couleurs les plus riantes que j'ai fini par les croire, du bout des lèvres cependant. Car je demande à voir.

Et maintenant voici qu'il pleut, et que pour changer un peu, je me trompe à nouveau.

 

 

 

 

 

 

Petit arrêt devant de belles pierres, bien typiques de l'endroit, du côté de Rieutord.

 

Et puis le pèlerin effectue une seconde halte, et un second frugal repas devant Nasbinals. Il est 14:15.

 

À ce moment surgit derrière moi la jeune femme amoureuse de l'Aubrac, rencontrée la veille au repas. Elle me dit qu'elle fait des "boucles". Je n'en saurai pas davantage. Elle disparaît de me vue et de ma mémoire, comme elle était arrivée.

Je reprends la route, bien péniblement. Les pieds se joignent aux genoux douloureux. Une symphonie dont je me passerais bien...

À l'entrée de Nasbinals, en face du cimetière, on remarque avec surprise une tombe isolée au bord de la route, avec une photo ainsi légendée : "À Pierre Roux, accordéoniste et compositeur, Maire de la commune". L'accordéoniste a dû marquer les esprits locaux, car au centre du village se dresse une imposante statue : "À notre Pierrounet…". Mais non, le Laborde, à l'étape, me détrompera : Pierrounet, trépassé avant la guerre de 14, était un rebouteux célèbre, paraît-il, dans toute l'Europe...

Et puis le sentier traverse des prairies ; ce ne sont pas des portes, qu'on franchit, mais de véritables "escaliers" rustiques. Et j'en ai compté une bonne douzaine. Me suis-je trompé, ou c'est ma lassitude qui m'a fait ressentir parfois la volonté manifeste d'exaspérer le pèlerin, de l'obliger à accrocher son sac aux barbelés ? Peut-être pour lui signifier qu'il n'est pas le bienvenu.

La pluie avait un peu cessé, la voilà qui redouble ; elle me contraint à déplier mon poncho ou plutôt à essayer de le déplier. Ah ! La pèlerine du pèlerin partant au vent, avec les ailes qui claquent ! Impossible de protéger sérieusement son sac, impossible de boire.

Et si les bêtes qu'on côtoie se mettaient à charger ? Cette idée m'a habité un certain temps, surtout que je ne voyais pas le bout de cette étape.

Enfer du dernier tronçon, au milieu des vaches, puis des chevaux. Aucun pèlerin médiéval n'a jamais dû passer par là, je vous en fiche mon billet, ou plutôt ma Credential... Jamais je n'avais marché aussi longtemps : je parviens, fourbu, au premier gîte qui me tombe sous la main, le seul sans doute, qui de plus est un monument historique, appelé la Tour des Anglais. Mais pour l'heure, ,je n'ai guère le cœur à remuer des souvenirs historiques, et autres fariboles du quatorzième siècle.

D'autant qu'une nouvelle déconvenue m'assaille : alors que je pensais pouvoir stopper au coquet rez-de-chaussée, la gardienne m'annonce sans aménité, et sans rire, que je me dois de filer immédiatement jusqu'au quatrième étage, tous les autres étant réservés... aux faux pèlerins en voiture. J'apprécie. D'autant qu'avant d'obtempérer, non par esprit de contradiction mais pour reprendre mon souffle et me sécher un tantinet, j'entends une de ces pécores se plaindre : "J'ai eu chaud toute l'après-midi, se lamente-t-elle, maintenant je suis toute moite" (la Clim, peut-être, ou alors le début d'un nouvel amour ?). Et moi qui suis trempé, et quasiment grelottant, j'ai envie de lui tirer une beigne. Mais je n'aurais pas eu le dessus, elle est accompagnée d'un gaillard en bien meilleure forme, apparemment, que moi...

Je fais aussi un brin de causette avec un jeune couple, avec deux enfants en bas-âge, qui s'essaie à effectuer quelques petites étapes. Lorsque je parle à la mère des difficultés de la fin du trajet, et que je m'étonne qu'ils aient pu le parcourir avec leurs enfants, elle m'avoue qu'ils ont tout bonnement, eux, emprunté la nationale à partir de Nasbinals, un paysan leur ayant dit qu'un agriculteur avait été tué par une de ses bêtes sur le chemin qu'empruntent les pèlerins. Charmant… Encore des sueurs froides rétroactives...

 

 

 

 

 

Là-dessus, je vais prendre possession de mon quatrième étage. L'inconvénient de devoir gravir toutes ces marches va être compensé : je serai seul, absolument seul dans le petit dortoir. Je pourrai m'y étaler autant que de besoin. Et le besoin de remettre un peu d'ordre dans mes affaires se fait nettement sentir...

 

 

 

 

 

Un autre inconvénient, naturellement, c'est que le quatrième étage est un dortoir pur et simple ; pour les sanitaires, il faut aller voir au rez-de-chaussée. Je n'y suis pas le premier. Je dois attendre, et ça fume de tous les côtés, on se croirait dans un sauna. Allons, faisons contre mauvaise fortune bon cœur !

Et pour panser mes plaies, au moins moralement, j'ai décidé de faire appel au secours d'un grand restaurant - enfin, je n'ai pas trop cherché à savoir, dans la bruine, s'il y avait tellement de restaurants, à Aubrac. En fait, mon Laborde y était allé de son commandement, le pèlerin-gastronome ne quittera pas l'Aubrac sans avoir goûté l'aligot, sur un ton tel qu'il ne tolérait pas l'objection ; alors, je me suis rendu à ce commandement fort alléchant. Arrivé trop tôt, bien évidemment. Une heure d'attente passée à mettre au clair et à jour mes notes.

Et voilà enfin venue l'heure du repas réparateur, au cours duquel, pour la première fois de ma vie, je vais (enfin) goûter au fameux aligot. Repas réparateur à 200 balles, mais il fallait bien ça, je pense, pour me remonter le moral. Tout en dégustant les plats, je n'en observe pas moins la salle. Nous y sommes trois pèlerins - je ne connais pas les deux autres, sortent-ils de quelque génération spontanée ? Tous trois, avec nos accoutrements assez ridicules (du moins dans un grand restaurant), nous jurons sacrément, il faut en convenir, face à la trentaine de touristes allemands en goguette ! Ça chante et ça boit, ça rit à gorge déployée, ce soir ça va calcer, pour reprendre l'expression, qui me revient tout soudain, de mon camarade Yvon, lors d'une soirée de fin de promo, du côté de Foix, si ma mémoire ne me trahit pas.

Pourtant, les Teutons ont soudain la chique coupée, le temps d'une stupeur : car la bruine se transforme sans crier gare en incroyable orage, tous les diables de la création tempêtent et se déchaînent, les lumières s'éteignent si les éclairs, par intermittence, s'allument... difficile de manier l'aligot avec un art consommé, dans ces conditions. Par bonheur, ma tenue pour le repos du pèlerin ne craint guère les vougnettes, comme on dit en Provence...

Les serveurs, le personnel, se précipitent. Lentement d'ailleurs, car les bougies ont mis du temps à faire leur apparition. Et nous voilà entrés dans la phase souper aux chandelles, j'avoue que c'est inattendu, et somme toute ravissant.

Mais le moment est venu de s'arracher à cette quiétude, à cette douce chaleur. Il faut songer à regagner le petit dortoir du quatrième étage. En moins de trois minutes, la parenthèse est brutalement fermée, le charme rompu ; non seulement je me gèle, mais encore je me trempe complètement pour retourner au gîte, situé à moins de cent mètres pourtant. Comme je suis seul, les couvertures supplémentaires ne manquent pas.

Et c'est en définitive une nuit fort douillette que je passe, vigie solitaire au sommet de ma tour.

 

 

6e jour - Jeudi 31 août Aubrac-Saint-Chély d'Aubrac

 

Il pleut dans la nuit. Il pleut toute la nuit.

 

 

 

 

Au matin, brouillard sur tout le pays. Ce n'est guère engageant, il faut bien le dire.

 

 

 

 

 

 

 

Pour me donner du cœur, j'ai décidé de partir plus tard que d'habitude, et d'honorer Germaine de ma présence. Germaine, j'ai fait sa connaissance la veille, dans le Laborde. Cet auteur, qui est l'alpha et l'oméga de tous les pèlerins, énonce doctement que ce serait un crime, après avoir passé la nuit à Aubrac, de repartir sans aller prendre le petit déjeune chez Germaine. Je ne puis donc qu'écouter le Laborde, d'autant plus que tout cela retardera le moment fatidique où il faudra se mettre en route. Et me vient a posteriori l'idée que le lecteur égrillard, qui attendait une histoire leste, va demeurer sur sa faim. Ce qui n'est pas mon cas, je vous assure !

 

 

 

 

 

Car si Germaine est une vieille dame - songez ! Elle a au moins soixante ans ! son petit déjeuner pantagruélique, lui, est des plus appétissant.

La preuve, je suis resté une bonne heure à en venir à bout, après avoir goûté, entre autres, à mille confitures naturellement faites maison.

Puis, après avoir pris une mauvaise photo des chats de mon hôtesse hélas éphémère, je dois me résoudre au départ : il est déjà neuf heures et demie passées.

 

Est-il besoin de préciser que c'est sous la pluie, que le pèlerin à la panse provisoirement rebondie s'éloigne, comme à regret ?

Immédiatement à la sortie du village, c'est la traversée d'une étendue privée. Mais on y accède par une porte comme on aimerait en voir partout, qui s'ouvre et se referme sans difficulté. Et puis c'est une longue descente, qui s'amorce.

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Les genoux n'en peuvent plus, le moral est dans les chaussettes, peu à peu se dessine en moi la nécessité d'un temps de repos, à mi-hauteur, à peu près, des contreforts du plateau. Ma décision est arrêtée tandis que j'atteins Saint-Chély d'Aubrac, avec tout de même une certaine honte de n'avoir marché qu'un peu moins de deux heures... Sous la pluie, certes...

Je m'installe confortablement dans le gîte composé de petites chambrettes, et j'ai déjà avisé la cheminée qui, par une belle flambuscade égaiera mon après-midi et surtout ma soirée. Les miennes, certes, et celles des autres, de celles et ceux qui ne manqueront pas de venir, peu à peu, se joindre à moi.

Un coup de téléphone passé à AL, pour savoir où en sont ses dents de sagesse, passé d'une cabine, car précisément le portable ne passe pas, ici - on s'habituerait presque au confort. Puis je vais renouveler mes provisions et je me laisse tenter, dans un magasin de souvenirs, par une folie, et ça ne me ressemble guère, par un authentique Laguiole. Il n'est pas donné, certes, à peu près l'équivalent de deux repas au restau d'hier soir, mais d'une part son manche en cade-genévrier sent tellement bon, quand on le frotte au préalable sur sa manche, d'autre part la sympathique marchande me fait irrésistiblement songer à la vendeuse de stylo, dans une scène reposante (avant la tempête) de Police Python 357. Enfin la brave dame me certifie qu'elle ne le vend pas cher, son couteau, presque sans bénéfice, vous n'aurez qu'à comparer avec les prix qu'on pratique ailleurs.

Ailleurs... J'ai comparé les prix à Espalion. Elle avait raison, très largement, la marchande de Saint-Chély. Depuis, chaque jour, quand j'ouvre mes lettres (non, je n'utilise pas ce magnifique engin pour trucider mes contemporains, encore que pour certains, ça me démange parfois), je respire l'odeur du manche, qui n'a pas faibli, et je songe à la minuscule boutique de ce village qui vit naître, sauf erreur... un fameux reporter dans l'affaire de Lurs. Mais ne nous égarons pas...

Long repos, voici un bail que je n'avais pas connu les délices de la sieste, surtout aussi prolongée. Je profite d'une accalmie pour aller ramasser un peu de bois, pour ce feu que je m'efforce d'allumer. C'est à cet instant, alors que je joue sans trop de succès les anges Boufareù, que surviennent les Cannoises, ou Grassoises, je ne sais plus très bien, qui effectuent ensemble une semaine de marche sur le chemin. Elles prennent le relais avec autorité - et succès. C'est parti, le feu nous chauffera, mais surtout illuminera notre soirée.

En toute fin d'après-midi, c'est au tour des deux jeunes gens qui, depuis Saugues, marchent à peu près dans mes pas, de pousser la porte du gîte. Ils me disent qu'ils arrêteront leur périple à Saint-Cosme d'Olt.

J'ai disposé de beaucoup de temps pour examiner de près l'étape à venir. Mais surtout, en comparant mon ouvrage avec ceux d'un autre voyageur à pied, j'ai eu la confirmation de ce que je subodorais depuis déjà un certain temps : mon Laborde est fort ancien - acheté huit ans auparavant, et le chemin qu'il décrit n'est pas exactement celui que je parcours. Le tracé "Compostelle" a varié, c'est incroyable mais c'est ainsi.

Donc, si j'ajoute à ce guide périmé, un sac beaucoup trop lourd, un bâton bien trop léger, des chaussures parfaitement inadéquates, on comprendra que je me sente mal barré. C'est bien le cas.

Toutes sortes de revues, de journaux ne datant pas tous de la veille, et même parfois d'une année antérieure, sont à la disposition de celui qui se repose. Je me plonge dans je ne sais quelle revue, où je remarque ce poème sans prétention aucune dû à un certain François Fabié (de Duranque), 1864-1928, à propos de l'Aubrac :

 


"Oui, c'est un beau concert, une joute superbe
Qui n'a point pour objet l'orgueil d'un savoir vain
Mais l'art de remplacer la ronce par la gerbe
Et de forcer la pierre à devenir du pain
".

 

 

7e jour - Vendredi 1er septembre Saint-Chély d'Aubrac-Espalion : 24 km 8h - 14:30

 

Il a encore plu, dans la nuit. Mais apparemment, je suis d'attaque, ayant dormi comme un enfant. Aussi est-ce en sifflotant que je m'élance le premier, hors de ce nid protecteur ayant gardé quelques traces de la flambée de la veille.

Par précaution, j'ai passé ma "tenue alpine". Bien m'en a pris. Vers Cambiassat, il faut emprunter un sentier bordé de fougères : lorsque je le quitte, je suis trempé des épaules aux pieds. Le pantalon ne séchera pas avant l'arrivée à Saint-Cosme, et encore. Quant aux souliers que je porte, aux baskets plus plus exactement, j'ai la désagréable impression qu'ils constituent deux petites mares dans lequelles je patauge, et chacun de mes pas fait naître un floc-floc inquiétant.

 

 

 

Et j'avance à peine : les Grassoises me dépassent peu avant Saint-Cosme d'Olt, vers 12:30, dans une descente atroce pour mes pieds, qui n'en peuvent plus. Je dois dire que ma fierté en prend un coup.

 

 

Mais je dépasse les deux dames un peu après : elles se sont arrêtées à Saint-Cosme pour se restaurer : je ne les reverrai plus.

Montée très difficile, et inutile, vers Espalion, puis descente où je suis à nouveau en grande difficulté.

 

 

Et c'est enfin Espalion sur le Lot, au pied des Monts de l'Aubrac, que le sentier longe, en principe, jusqu'à Golinhac.

 

 

 

 

 

À l'arrivée, enfin, au terrain de camping, qui fait office de gîte, on me remet les clés d'une caravane pour moi tout seul ! Pourvue d'un immense auvent. !

Il est vrai qu'il n'y a pas foule, en cette fin de saison touristique.

À l'intérieur flotte une odeur de renfermé, pour ne pas dire plus. Mais il faut s'y faire.

Après l'indispensable et bonne douche, je dors de trois à cinq : trop longtemps, et surtout trop tard pour aller poster une seconde lettre, bourrée de documents, à ma propre adresse.

Petit tour du propriétaire dans Espalion, jolie petite ville. À pas lents et mesurés, je m'empresse de le dire. Je téléphone à Gérard qui me fait comprendre que je suis complètement fou d'avoir entrepris un tel voyage. Enfin, il utilise un mot plus cru, de trois lettres pas plus...

Une bière naturellement, je l'ai bien gagnée ! Au bar "Chez Jo". Tiens, je reviendrai demain matin faire une photo, ça amusera un pilier de bar, un demi d'ouverture plus exactement, de mes amis...

Et puis je me réapprovisionne, et je passe chez un traiteur - on ne se refuse rien - pour le repas du soir. Avec une canette de bière, bien abrité sous l'auvent, ce sera pantagruélique !

 

 

8e jour - Samedi 2 septembre Espalion-Estaing

 

 

 

 

 

Excellente nuit réparatrice, malgré la longue sieste d'hier après-midi ! Et malgré la pluie, qui s'est remise à tomber, dès trois heures ce matin. Preuve que mon organisme commence à demander merci.

 

 

 

 

J'ai décidé de ne pas me presser. Par le hublot de la caravane, je suis les allées et venues d'une famille avec quatre enfants, et trois tentes. Six personnes en train de remballer du matériel de camping. Sous la pluie, même si elle n'est pas très forte, cela ne paraît pas très facile.

 

 

Puis j'en viens à un excellent petit déjeuner, parfaitement en accord avec mon taux alarmant de cholestérol : de nombreuses tartines de pâté au Roquefort. Je traîne un peu, j'ai plus qu'assez de la pluie, j'hésite à plier bagages. Mais vers 9 heures, une accalmie semble se dessiner.

 

 

 

 

J'en profite pour aller photographier la devanture de "chez Jo", que j'avais repérée la veille. Je sais que ma photo fera plaisir à quelqu'un.

 

 

 

 

 

 

Je lambine et ne pars qu'à 10 heures. Je passe à La Poste et prends une photo du superbe pont roman. Il est 10:17 quand je sors de La Poste, et il fait 17°. Et si j'étais parti à 10:25 ?

 

À la sortie d'Espalion, il faut déjà passer le poncho, mais c'est temps et peine perdus, car l'averse ne dure pas.

Près du cimetière du village voisin, je suis doublé par un pèlerin qui ressemble trait pour trait à mon regretté camarade A. B.

Nous engageons la conversation, et il m'apprend qu'il effectue le pèlerinage de Compostelle pour la seconde fois. Je remarque des dents très déchaussées, et je me demande si cela ne me guette pas, moi aussi, à plus ou moins brève échéance.

C'est curieux - est-ce la magie du Chemin ? - nous nous connaissons depuis moins de cinq minutes, mais il y va déjà de ses confidences, à moins que, se sentant en confiance auprès d'un alter ego, et n'en pouvant plus, il décide de lâcher la bonde ; il me confesse en effet se sentir coupable, sa fille passant des moments difficiles ; il se reproche d'être là, alors qu'il serait plus utile à ses côtés.

Je ne connaîtrai pas la nature des difficultés, car soudain il me lâche nettement, et même me sème, dans la côte que nous avons alors à gravir. Cependant quand, au sommet, je le rejoins enfin, il s'écrie, tout essoufflé sinon à bout : on l'a eue !

À mon tour de le passer : je ne le reverrai plus, sauf incidemment à l'étape, au cours de l'après-midi, flânant parmi les pêcheurs d'Estaing, ou furetant à l'Office du Tourisme.

 

Arrivée à Estaing

 

 

Vers onze heures apparaissent les premiers champs de tabac.

Et le panorama qui s'offre, en arrivant à Estaing, est à ce point superbe qu'il ne m'a pas paru tellement malhonnête de substituer au ciel d'origine uniformément gris, un autre, rayonnant, emprunté à un paysage de montagne iséroise !

 

 

Avant de pouvoir accéder au gîte, il faut retourner sur ses pas, aller négocier dans un bar, situé au bord du Lot, le prêt d'une clé.

Les pèlerins sont logés dans une ancienne église désaffectée, et correctement aménagée. Je touche au but tout juste avant un groupe de six jeunes gens (trois filles, trois garçons) bien sympathiques.

Après l'installation - dans une sorte d'alvéole à deux lits, mais le second ne trouvera pas d'occupant - c'est évidemment la toilette, la petite lessive, les rangements divers et naturellement un brin de sieste. Le temps est ensuite à moi pour flâner à petits pas, bien petits, pour ne pas augmenter certaines douleurs, à travers les vieilles pierres, et nourrir mes songes. Je ne sais pas encore que l'ancien Président de la République, auquel on ne peut pas ne pas songer en parcourant ce village, y songe lui aussi, pour se donner moyennant finances un vrai-faux air d'aristocrate. L'Office du tourisme est par bonheur ouvert, j'y fais ample moisson de documents, et je me fais même adresser, chez moi, une immense et magnifique carte de la vallée du Lot, une sorte de vue panoramique allant des Monts de Margeride à la Garonne - qui est encore aujourd'hui sous mes yeux, lorsque je les lève un temps de ma tâche, et qui me rappelle tant de bons et plus pénibles moments.

Encore un repas du soir pantagruélique, acquis pour 20 F dans une boulangerie, ouverte tout le dimanche : gros sandwich au pâté (heureusement qu'en principe, le chemin est fait pour, entre autres, éliminer le maximum de toxines), morceau de fouace, Coca-Cola ! Je me couche relativement tôt, étant assez désœuvré. Lorsque les six jeunes gens de tout à l'heure viennent se coucher à leur tour, dans une remarquable discrétion, ils me réveillent cependant au cœur de mon premier sommeil.

Las et patatras ! À peine suis-je sur le point de réussir à me rendormir, que des gens en goguette - avec un chien ! - envahissent toutes les places libres du dortoir - sauf celle à côté de moi, puisque j'y ai déposé mes affaires. Je passe les interjections, les grossièretés, les rires à gorge déployée... À près d'une heure du matin...

Mauvaise nuit, donc. Normal, c'est samedi soir. Une fois encore, je suis victime de ces profiteurs du samedi soir, qui sont pèlerins comme je suis membre de la Ligue communiste révolutionnaire, et qui s'octroient à peu de frais les moyens d'une virée gastronomique, par exemple. Il est vrai qu'ils me rétorqueraient : si on ne peut plus s'amuser entre amis une fois par semaine, alors...

 

 

9e jour - Dimanche 3 septembre Estaing-Golinhac

 

À 7 heures 30, je suis fin prêt. En partant, je m'aperçois que les drôles de pèlerins de cette nuit ont rangé leurs modestes R25 devant le Gîte communal… Et allez donc !

Sur le pont d'Estaing, je donne un coup de chapeau à la statue de Bienheureux François d'Estaing, 1460-1529, évêque et comte de Rodez. Le patelin semble également vénérer un autre grand homme, Roumiou, "célèbre" humoriste aveyronnais, dont le petit-fils doit être le Maire du lieu. En attendant Giscard d'Estaing...

 

 

 

Et maintenant la route goudronnée succède à de la route goudronnée, et ça monte, en direction de Montagut-Haut, le fort bien nommé !

 

Matinée assez peu intéressante, de mon point de vue.

 

Mais surtout, une fois encore, je me rends compte que mes étapes ne sont pas suffisamment longues, même s'il est vrai que je dois épargner mes jambes en bien mauvais état. Car j'atteins Golinhac un peu après onze heures et demie...

Deux heures et davantage à me geler (il pleut, en plus), car le gîte n'ouvre qu'à 14:30 !

Heureusement, j'ai pu me changer en plein air, sous le petit abri constitué par le lieu de lavage du linge ! heureusement, j'ai pu potasser le Laborde, revoir mes étapes, qui ne sont pas exactement celles du livre, écrire un peu, me repasser les dorso-vélaires sourde et sonore (Golinhac = Collinius) et rechercher des exemples révélant comment, au plan linguistique, l'ontogenèse semble reproduire la phylogenèse. On fait passer le temps comme on le peut...

 

Photo X...

 

Dès l'ouverture du gîte, j'allume un bon feu… dont profiteront les autres. Mais qu'importe : la joie de ceux qui arrivent, mouillés, et qui s'approchent du feu vaut toutes les récompenses, tandis que, redevenant bachelardien pour un temps, je fais défiler sur les flammes dansantes des bribes de mon passé, et mes souvenirs de rentrée scolaire...

 

Ma rêverie est soudain interrompue par l'arrivée d'un homme très costaud, bardé de croix. Je le prends tout d'abord pour un prêtre, mais ce n'est qu'un laïc. En tous cas, il dégage une odeur bizarre, que la chaleur du foyer ne fait qu'amplifier. Il doit être épuisé, car il dort toute l'après-midi. Réveillé, il est sorti plusieurs fois, pour appeler sa femme, m'a-t-il précisé, alors que je ne lui demandais rien.

Lui aussi est en veine de confidences, il m'apprend qu'il avait commencé le parcours dix jours auparavant puis, ayant flanché dès la troisième étape, était remonté à Paris se "faire retaper" par son épouse. Curieux cheminement, en vérité. Quoi qu'il en soit, je ne le reverrai plus.

Se joignent aussi à nous plusieurs pèlerins allemands, dont un instit ; une jeune femme végétarienne, professeur de danse ; un couple arrivé très tard, dont le mari porte en permanence des sandales.

Enfin, un jeune homme de l'Est de la France, qui sera le premier à prendre la route à mon côté, demain matin ; je lui donne 35 ans, il me remercie chaleureusement et me confie qu'il en a près de 50… Dans son entreprise, on peut cumuler les congés non pris. Il a donc procédé à une sorte de capitalisation ces dernières années, et dispose dès lors de deux mois pleins pour se rendre à Saint-Jean de Compostelle.

Le repas du soir est convivial et animé, tandis que la nuit tombe si vite, au dehors. Nuit qui me verra encore rêver d'école, et je me retrouve même, accompagné d'un des enseignants de mes enfants, place Dubedout, en train d'observer des écoliers... traversant l'Isère à gué !

 

 

10e jour - Lundi 4 septembre Golinhac-Conques 21 km

 

C'est la rentrée des classes ! La première qui me soit à peu près indifférente. Enfin, là je mens un petit peu et je dis fièrement cette histoire est finie, comme dit la chanson.... Les journaux, que j'ai acquis en route, me détaillent d'ailleurs toute une fébrile agitation, à laquelle désormais je n'aurai plus part.

Tiens, je m'aperçois que j'ai dû sortir ma dernière photocopie, car anticipant sur la randonnée, j'avais préparé plusieurs pages afin de pouvoir suivre plus commodément mon itinéraire, sans avoir à sortir le bouquin : en fait, cette précaution ne m'a pas empêché de commettre bien des erreurs de parcours.

J'ai quitté le gîte en compagnie du "jeune homme" venu de l'Est, et je remarque d'emblée qu'il est fort agréable de n'être point seul, et que le commerce de ce pèlerin est particulièrement sympathique, car nous nous trouvons (depuis la veille, c'est vrai) de nombreux points communs ; à propos de l'attitude de certains pèlerins désinvoltes, que nous avons déplorée tous les deux, il énonce un "on prend et on jette", que nous nous accordons bientôt à considérer comme l'alpha et l'oméga de bien des rapports de sociabilité modernes.

Mais bientôt, je le sens qui peine ; il me dit qu'il est fatigué, et il est vrai que mon pas, pourtant pas très alerte en ce moment, me porterait bien au-delà de lui si je ne me freinais pas sévèrement. Il s'en aperçoit, me demande d'aller de l'avant. Je le dépasse bientôt. Je le reverrai en fin d'après-midi à Conques, et ce sera pour la dernière fois.

Je poursuis donc tout seul, et c'est en brodant sur la réflexion que je viens d'entendre. Je songe à cette société consumériste qui se remarque jusque aux bords du Chemin (canettes, papiers divers, reliefs) et même, me suis-je laissé dire, du côté du Toit du Monde. On consomme et on jette ; je me souviens qu'une personne m'avait un jour avoué cyniquement : je les ai tous jetés, et dans son esprit il ne s'agissait évidemment pas des nombreux livres qu'elle n'avait d'ailleurs pas lus...

 

 

 

Mon allure est maintenant soutenue. Un peu avant neuf heures, je laisse Espeyrac derrière moi.

J'atteins Sénergues et sa tour à la demie : par rapport aux indications du Laborde, j'ai gagné vingt minutes !

 

 

 

 

 

 

 

 

Tiens, c'est d'ici, je l'apprendrai bientôt, que sont partis ce matin les six jeunes si sympathiques, ceux dont j'ai fait la connaissance à Estaing.

Je vais pourtant les doubler bien vite…

Est-ce parce que j'ai voulu forcer l'allure ? Je n'ai pas beaucoup de souvenirs de cette fin d'étape. Il me semble que la magnifique vue plongeante sur Conques, dans la descente, ne m'a pas été donnée. Elle doit être réservée aux automobilistes. Car la fin du parcours pèlerin s'effectue à couvert, dans une pente prononcée qui, les jours de grande pluie, doit être du type "roùmpe cuoù".

 

 

 

 

Mais l'arrivée au village, et pour moi c'est vers 12:15, est fort belle.

Le gîte municipal est assez sommaire, j'y passerai deux nuits, puisque j'ai décidé d'un nouvel arrêt pour reposer mes genoux.

 

 

 

J'ai rencontré, en fin de journée, la végétarienne et l'instituteur allemand (lui termine ici son périple) connus hier après-midi à Golinhac. Je leur paie un coup à boire, tandis que je regarde le tympan dont mon ami Hugues m'a demandé de m'imprégner.

Au gîte, je suis seul avec les six jeunes dont j'ai fait la connaissance à Estaing. Leur "responsable" m'explique qu'ils ont déjà fait une première semaine en juin, et viennent de repartir pour une seconde en ce début septembre. Et qu'ils tâcheront de continuer l'année prochaine.

Le soir, j'ai décidé de me payer un bon repas, mettons que ce soit pour fêter mon exclusion du cercle de la rentrée des classes ! Un bon repas, à la hauteur de celui d'Aubrac.

Ma foi (à Conques, ce terme s'impose), manger en plein air, par une belle soirée certes un peu fraîche (la pluie n'est pas un souvenir lointain), tandis que s'allument les astres, c'est une expérience qui ne se refuse pas. Et je l'ai savourée jusqu'au bout, tout en observant du coin de l'œil les six jeunes, à quelques tables de moi, partager joyeusement un repas beaucoup plus frugal que le mien !

J'ai mis le portable à recharger durant la nuit, il ne l'avait plus été depuis Montbonnet. Il est vrai que je ne l'use guère que pour réserver ma place, d'étape en étape, ce qui est toujours utile, et s'avère parfois indispensable.

Encore un rêve scolaire, où il est question de mathématique, d'agrégation, et d'une collègue que je détestais cordialement, jadis, l'archétype du prof médiocre et borné. Que revient-elle faire, en mon for intérieur ?

 

 

11e jour - Mardi 5 septembre Repos à Conques

 

Une fois n'est pas coutume, je me paie une "grasse matinée" : en fait, j'attends tout bonnement le départ des jeunes, qui s'effectue à huit heures.

En descendant vers l'abbatiale, avec un terrible mal aux genoux, qui irradie jusqu'à la plante des pieds, je croise le mari du couple rencontré à Golinhac. Il me dit que pour eux, les vacances c'est fini, mais que de toutes façons, sa femme souffrait beaucoup trop des genoux. Tiens, elle aussi ?

 

 

 

Je m'attarde devant le fameux tympan du Jugement dernier, et ses 124 personnages. Il y a beaucoup à méditer, là-dessus. Difficile de se détacher de tant de beauté.

 

 

Je suis allé jusqu'à la Poste, où j'ai eu toutes les peines du monde à me faire délivrer quelque argent : depuis le vol de mes papiers, sur une route de montagne, à Prabert très exactement, un je ne sais quel interdit pèse sur mes retraits. Et cela fait maintenant quatre années !

Comme j'ai peut-être mangé exagérément hier soir, et qu'aucun effort ne sera accompli aujourd'hui, je décide de m'imposer une frugalité certaine : je ne vais consommer, en tout et pour tout, que quelques modestes pâtes, prélevées sur un gros paquet abandonné sur place par des pèlerins !

Finalement, une fois de plus, n'était ce repos contraint et forcé auquel m'oblige l'état assez lamentable de mes membres inférieurs, je me suis un peu/beaucoup ennuyé, tout au long de cette journée.

J'ai vu partir les six jeunes, j'ai accueilli vers 13 heures un pèlerin émacié, que je vais longtemps revoir et apprendre à connaître, c'est Gabriel, à l'allure quelque peu curieuse ; puis deux des trois Allemandes rencontrées au gîte du camping de Saugues - la troisième, la plus âgée, a arrêté à Aumont-Aubrac, faute de temps. Et j'ai naturellement lu et relu les journaux : j'avais du temps pour cela.

Ma grande découverte de la journée, c'est que le temps scolaire ne rythme plus du tout ma vie, comme jusqu'ici, en tous cas ma vie vécue, car je ne suis pas encore maître de mes rêves. Et je constate, avec quelque étonnement, qu'il y a une vie après la rentrée scolaire - je me suis à peine aperçu de ce fait en croisant un papa conduisant son fils à l'école (lourd cartable, sans doute neuf) hier matin et, à l'instant, un bout de chou descendant vaillamment des hauteurs (où se trouve l'école publique, à côté du Centre européen).

 

 

 

Devant l'abbatiale, on trouve cette après-midi autant de touristes qu'hier, et des tas de couples jeunes ou moins jeunes, dont pas mal de Français - moins d'Allemands qu'hier.

 

 

 

 

 

 

J'ai acheté de ces signets dont j'aime à retrouver la présence dans mes livres, sentinelles immobiles et immuables, qui attendent qu'on s'intéresse à eux, ou qu'on poursuive la lecture à partir de la page qu'ils gardent ; et je suis allé, par un geste de paganisme absurde, jeter quelques piécettes dans le baptistère de l'ancien cloître... En revanche, je suis resté assez froid devant les fameux vitraux de Soulages, universellement admirés, paraît-il, et j'en ai conçu quelque coupable honte...

Surtout, je m'étais en principe arrêté pour consulter ; las, je suis revenu bredouille d'une visite à l'unique médecin du coin, en congé ce jour-là. En définitive, malgré des douleurs toujours aussi présentes, j'ai vraiment hâte de reprendre la route.

 

 

 

 

Cette journée de repos a été trop longue, malgré de courtes promenades dans les environs immédiats, trop apte à la rumination intérieure, au vagabondage de la vue sur les forêts aveyronnaises environnantes.

 

 

Au cours de la nuit, les songes m'ont à nouveau assailli : j'ai rêvé que je participais à une sorte de forum aux hobbies. J'y faisais une démonstration à propos des archives et, dans les registres d'État Civil de mon lieu de naissance, j'avais la très heureuse fortune de découvrir en direct, si je puis dire, des Instructions Officielles inédites (!), datant de Jules Ferry (!!), et concernant l'EPS (!!!). Tandis qu'à côté de moi, un de mes meilleurs instituteurs montrait aux curieux qui l'entouraient le palonnier tout abîmé d'un avion américain de la dernière guerre ! Et me vint immédiatement, alors, l'idée que sans doute Frz pourrait, en Californie, lui en dénicher un en bien meilleur état...