Dans le téléfilm scélérat produit par (et diffusé sur) TF1 en octobre 2003 (l'Affaire Dominici), le journaliste Lukas Fabre (joué par l'excellent Thomas Jouannet) Monsieur je sais tout - copie conforme de W. Reymond - a l'audace de risquer un fielleux amalgame entre l'affaire de Lurs et celle du col de Tosa (ce qui lui permet d'impliquer à la fois d'invisibles services secrets, et de "dénoncer" l'impéritie des autorités françaises). Ainsi, les auteurs du téléfilm lui font dire (tandis qu'il s'efforce de convaincre un Me Pollak dubitatif) :

"En 1952, au moins trois scientifiques ont été victimes de la riposte soviétique ; un Allemand, l'atomiste Éric Krammer, et deux Britanniques, le Dr Peck près de la frontière espagnole, et Sir Drummond à Lurs" [Reymond a puisé le nom de Krammer dans les fameuses/fumeuses confessions de Bartkowski].

Même si, sur les millions de téléspectateurs ayant vu le téléfilm, une poignée seulement, sans doute, a relevé cette incroyable affirmation, il n'est peut-être pas inutile d'éclairer un peu l'affaire du col de Tosa...

 

"Los franquistas han elegido a unos subditos ingleses como victimas, porque saben que Inglaterra, que el pueblo inglés no tiene simpatias hacia El franquismo, para producir una reacción en la opinión inglesa contra los antifranquistas espagñoles" (Por la C.N.T. de España en El Exilio. El Secretariado Intercontinental. Toulouse, 30 de Julio de 1953).

 

I. Les faits (rapportés à travers la lecture des journaux de l'époque)

 






Deux touristes anglais, le docteur Bernard Peck (spécialiste en dermatologie exerçant à Plymouth) et son épouse Dora, tous deux âgés de 31 ans, ont vu leur véhicule mitraillé en Espagne, quelques kilomètres après la frontière française, le samedi 25 juillet 1953 (qui était jour de grande kermesse en Catalogne - fête patronale de Saint-Jacques), aux alentours de 17 heures.






Le Dr Peck et son épouse, qui avaient laissé à Plymouth leurs deux fillettes (Caroline, 4 ans, et Paméla, 2 ans) à la garde d'une nurse, étaient venus pour quelques jours en France. Sur le point de rentrer chez eux, ils avaient décidé de passer en Espagne leur dernière semaine de vacances. Venant de Bourg-Madame, poste-frontière où ils avaient quitté les Pyrénées orientales, ils roulaient depuis Puigcerdá en Haute-Catalogne espagnole en direction de Barcelone, via Ripoll.

 







C'est environ trois kilomètres après la frontière, au lieu dit Foun El Auto (la fontaine des automobilistes), à une dizaine de kilomètres du col de Tosa (1 400 m), que leur 10 CV Ford Zéphyr, de couleur bleue, dut s'arrêter : deux hommes armés de pistolets-mitrailleurs(1) leur barraient la route. Croyant avoir affaire à des policiers ou à des douaniers, le Dr Peck stoppa. Les deux hommes firent descendre le conducteur. Ils lui demandèrent ses papiers, les examinèrent, puis s'emparèrent de l'appareil photographique du couple, et firent au conducteur un signe que ce dernier interpréta comme une invite à repartir. Mais la voiture s'était à peine éloignée d'une dizaine de mètres que les individus l'arrosèrent au P. M.






Mme Peck, atteinte de neuf balles, mourut sur le coup. Son époux, n'ayant reçu que cinq balles (une au maxillaire inférieur, deux aux épaules, une à la main gauche et la dernière dans la région des reins), put continuer un peu sa route jusqu'à ce qu'un tournant le dissimule à ses assaillants. Il quitta alors son véhicule pour se mettre à couvert dans les fourrés, mais les deux hommes s'évanouirent dans la nature, sans chercher à retrouver leur victime (la supposaient-ils morte, elle aussi ?). Plus tard, le Dr Peck, bien que sérieusement blessé, réussit à héler un motocycliste et lui expliqua la tragédie ; le motard fonça aussitôt en direction de Puigcerdá pour avertir la police, ce qu'il fit avec retard, ayant été (dit-on), à cause de sa trop grande hâte, victime d'une chute. Sur ces entrefaites, deux véhicules venant de Puigcerdá stoppèrent à la hauteur de la Ford. Selon certaines informations, un médecin français (de Marseille), passager de l'un des véhicules, prodigua les premiers soins à son confrère anglais, qui fut ensuite conduit, avec la dépouille de son épouse, à l'hôpital de Puigcerdá. D'autres informations rapportent, ce n'est d'ailleurs pas contradictoire, que la passagère de l'autre véhicule, une Espagnole d'origine américaine, eut la présence d'esprit de bientôt téléphoner à Barcelone, pour faire appel à un chirurgien de sa connaissance. Elle apprit ainsi que, par hasard, ce chirurgien voyageait dans un train passant par Puigcerdá. Elle alla l'attendre à la gare, le fit descendre du train, et le conduisit à l'hôpital, où il mena à bien, successivement, deux opérations délicates.

 






Pendant ce temps, la police espagnole arrivait sur les lieux pour effectuer les premières constatations : le véhicule des époux Peck avait subi trente impacts de balles(2). Une chasse à l'homme s'organisa bientôt du côté espagnol (policiers et gardes civils) comme du côté français (C. R. S. et gendarmes) pour tenter de retrouver les assassins.


Cependant qu'à l'hôpital le Dr Peck, après avoir reçu deux transfusions (il se dit que la première fut effectuée grâce au concours d'un facteur de Puigcerdá, tandis que pour la seconde, se portèrent volontaires des soldats en garnison dans ce lieu), revenait lentement à la vie. Il déclara bientôt (par écrit, car il ne pouvait parler) à ceux qui l'interrogeaient que son véhicule avait été arrêté par des hommes "noirs et mal habillés", âgés respectivement d'environ 40 et 20 ans. Les policiers lui montrèrent un jeu d'une centaine de photos de hors-la-loi : il reconnut, ou crut reconnaître, ses deux agresseurs. Les policiers lui apprirent que le premier de ces hommes, recherché par toutes les polices espagnoles, se nommait Ramón Capdevila, ou Vila tout court, dit Cara Quemada (Visage brûlé)(3), cependant que le sobriquet de son complice était El Croix (le Boiteux)(4). .Les premières informations, en provenance d'Espagne, font donc état d'une attaque effectuée par deux bandits, des "terroristes" espagnols(5).

 

 




En dépit des véritables battues effectuées par les policiers espagnols (jusqu'à la Principauté d'Andorre, à 65 km de là), dès le lendemain, la présence de Cara Quemada fut signalée en divers points des Pyrénées-Orientales, en particulier dans la région de Dorres (à 30 km au nord de Bourg-Madame) et de La Bastide (à 60 km de Dorres). "On croit savoir, ajoutait d'ailleurs une note de l'A F. P. en date du 30 juillet, "que le terroriste espagnol a été pris en charge par une voiture venant de Toulouse, qui l'aurait amené ce matin dans cette région". Ce qui attira, envers l'attitude permissive de la France, les commentaires désobligeants de la part de Don Maza, le gouverneur civil de Gerone, qui ne manqua pas de souligner que "les facilités qu'offre la frontière aux assassins rendent difficiles les recherches pour les localiser et les capturer en Espagne, car ils opèrent pratiquement sans courir aucun risque depuis la nation voisine" (ce communiqué, qui fut d'ailleurs retiré peu après, continuait ainsi : "le crime [contre les époux Peck] n'est qu'une attaque anarchiste délibérée pour tenter de mettre le gouvernement franquiste dans l'embarras"). Plus discrètement, l'éditorialiste du journal phalangiste Arriba, dans sa livraison du 29 juillet 1953, affirme que les auteurs de l'attentat doivent être recherchés en France, parmi les républicains espagnols qui bénéficient, depuis la fin de la guerre civile, de la "discrète tolérance des autorités françaises". Et il ajoute : "Depuis de nombreuses années, la frontière franco-espagnole n'a été qu'un sujet de tragédies et de mécontentement d'une façon unilatérale, puisque de notre part, la France n'a jamais eu rien à craindre, même au temps de la guerre, alors que, de notre côté, il nous a fallu vivre dans un constant état d'alerte, par suite des machinations tant démocratiques qu'anarchistes et communistes, délicatement favorisées par l'inhibition - lorsque ce n'était pas simplement la complaisance - des Français".
Le quotidien français Combat répliqua superbement : "les exilés espagnols, qui sont en exil précisément parce qu'ils ne consentaient pas à la victoire de forces favorables à Hitler et à Mussolini, et aidées par eux, ne sont pas une réserve d'assassins de grand chemin".

Il convient de souligner que, d'emblée, les journaux(6) firent le rapprochement avec l'assassinat des Drummond (à cette époque non résolu), dont on devait commémorer, une semaine plus tard, le premier anniversaire (une imposante cérémonie eut d'ailleurs lieu à Forcalquier). Ils titrèrent, pour nombre d'entre eux  : "Un an après l'affaire de Lurs, le drame du col de Tosa"(7).

 

 

II. Les hypothèses en présence

 

En gros, on voyait généralement dans cet attentat un acte de banditisme transformé par la garde civile espagnole (police franquiste) en affaire politique, dont la responsabilité était rejetée sur les organisations clandestines opposées au franquisme.

 

A. Du côté espagnol.

 

La thèse "terroriste", déjà évoquée.

Dans un deuxième temps et très brièvement, la thèse du crime crapuleux est retenue, car le Dr Peck n'était pas complètement sûr de reconnaître les assassins parmi les photos qu'on lui présentait. Le gouverneur Maza affirmait ainsi que cette expédition avait été préparée et accomplie par "la voyoucratie espagnole réfugiée en France".
On alla jusqu'à prétendre que si le Dr Peck n'avait pas redémarré brutalement, interprétant mal le signe de l'un des bandits, ces derniers auraient sans doute délesté le couple de ses objets de valeur, mais l'aurait laissé repartir sans autre dommage.

On en revint ensuite à la thèse de l'action anarchiste destinée à nuire aux intérêts de l'Espagne, en dissuadant les touristes de venir apporter leurs devises au franquisme. Ainsi, un accident survenu le même jour, dans les environs, sur le funiculaire Monistrol-Montserrat (9 morts, 107 blessés, parmi les pèlerins qui se rendaient, pour la fête de Saint-Jacques, au monastère de Montserrat, les freins d'une rame ayant cédé, entraînant une triple collision), fut également attribué à "Tête brûlée".

 

B. Du côté français

 

L'agacement de la France se retrouve parfaitement dans l'article ci-après, que publia Franc-Tireur dans sa livraison du 30 juillet : "Il n'est pas question de chercher à minimiser l'horreur du crime du col de Tosa sur lequel il est souhaitable, à bien des égards, que la lumière soit faite. Il ne s'agit pas davantage de prendre position en ce qui concerne la culpabilité ou l'innocence de Ramón Vila. Mais il est permis de juger, après les informations souvent incohérentes données par les autorités franquistes, que l'on s'est un peu trop pressé à désigner catégoriquement Vila comme le criminel. Ainsi que le disait un de nos confrères du soir, on peut penser que les déclarations du docteur Peck, lorsqu'il s'agissait de reconnaître son agresseur d'après des photographies, lui ont été suggérées. On est d'autant plus fondé à le croire qu'un peu plus tard on apprenait que, sur une nouvelle photographie, Mr Peck n'avait pas reconnu "Cara Quemada".

Sans doute est-il permis de remarquer que, dans un pays où les opposants au régime sont exécutés sommairement (ne nous dit-on pas que neuf syndicalistes, qui se trouvaient à l'imprimerie clandestine de Besalù lorsque celle-ci fut récemment découverte, ont été fusillés sur place) alors que l'on prend la peine de juger les bandits, la capture de Ramón Vila, résistant antifranquiste, importe davantage que celle de l'agresseur des époux Peck.

La volonté de désigner Cara Quemada - coupable ou non - comme le criminel est en tous cas manifeste. Mais dans leur hâte à accuser, les autorités franquistes ont négligé d'accorder leurs violons. D'abord on n'a en effet pas craint d'affirmer que Ramón Vila avait voulu venger ses amis, trois militants communistes qui trouvèrent la mort dans un combat contre la garde civile, alors qu'ils tentaient de franchir la frontière pyrénéenne. On avançait même que l'un des trois hommes était l'ami intime de Ramón Vila qui le considérait comme son frère. En même temps, on représentait "Care Quemada" comme un anarchiste irréductible caracolant sur son cheval en brandissant le drapeau noir des libertaires !.. Quelle personne tant soit peu au courant des choses politiques pourrait prendre au sérieux l'histoire de cette prétendue amitié anarcho-communiste ?

Chacun ne sait-il pas que les stalinistes sont les ennemis des anarchistes, au même titre que les franquistes ? Inimitié d'ailleurs ancienne, et qui trouva de cruelles illustrations au cours de la guerre d'Espagne. Il est vrai que le lendemain, il y eut rectification et que s'il était toujours question de vengeance, elle se rapportait non plus aux communistes mais aux camarades de l'imprimerie clandestine de Besalù.

Ramón Vila est sans doute un des chefs de la résistance anti-franquiste, connu du reste en Catalogne où il est représenté comme un maniaque du sabotage, s'attaquant particulièrement, dit-on, aux pylônes électriques qu'il se plaît à faire sauter pour paralyser certaines industries. Mais jusqu'à présent il n'a jamais été considéré ici que comme un "résistant d'honneur", soucieux justement de ménager des vies humaines. Qui sait ? Nous croyons qu'il serait téméraire de nous prononcer sur sa mentalité et nous garderons de le faire, nous attachant seulement à démontrer le côté tendancieux et fabriqué des accusations franquistes. L'horrible crime du Col de Tosa a été commis. On a de bonnes raisons de penser que les autorités franquistes chercheront à l'exploiter contre la résistance espagnole.

Enfin un détail concernant l'état-civil de Ramón Vila. Il est faux qu'il soit le fils d'un notaire. Ses parents étaient de pauvres paysans et chacun, dans la région de Berga se souvient des circonstances au cours desquelles ils trouvèrent la mort. Toute la famille se trouvait réunie à la maison alors qu'il faisait un violent orage. La foudre tomba par la cheminée, tuant tout le monde à l'exception du jeune homme qui fut cruellement brûlé au visage et ne garda de l'accident que l'affreuse cicatrice à laquelle il doit son surnom, et qui espérons-le, devrait permettre au Docteur Peck de se prononcer sans équivoque sur l'identité de son agresseur".

. L'hypothèse d'une vengeance était envisagée. Ces terroristes, disait-on, auraient voulu venger la mort de deux de leurs camarades récemment abattus, sensiblement au même endroit, par la police franquiste, tandis qu'un troisième homme, pour échapper à l'arrestation, se faisait sauter à la grenade(8).

. On pensa aussi à une action destinée à discréditer le régime politique espagnol et l'action de la police franquiste à la frontière espagnole. Ce qui est sans doute démontré par le seul fait que la police a dû, très rapidement, laisser la place à la garde civile (encore nommée phalange franquiste) qui semble avoir été, par la suite, chargée des opérations de ratissage.

. Il y eut aussi l'évocation brève (et fort controversée) d'une possible méprise de policiers auxiliaires espagnols qui, ce jour-là, surveillant des manœuvres effectuées dans les parages par l'armée espagnole, auraient appliqué les consignes reçues avec trop de zèle.

. Enfin, il s'agissait peut-être d'attirer l'attention du monde - et du peuple espagnol - sur l'existence et l'importance du mouvement anti-franquiste. Comme les journaux de la péninsule taisent régulièrement les nombreux actes de sabotage effectués par les "terroristes", les anarcho-syndicalistes ont voulu peut-être frapper un grand coup pour déchirer le rideau des "habituels silences" (selon l'expression de Paris-Presse, du 30 juillet 1953).

 

 

III. Pièces diverses

 

A. Dépêches de l'Agence France-Presse

 

Toulouse 5 Août (AFP) - la "Dépêche du Midi" publie ce matin un article signé d'un de ses collaborateurs toulousains, dans lequel celui-ci se déclare en mesure d'affirmer que le Docteur Peck et sa femme ont été victimes, non pas de terroristes, mais d'une méprise de policiers auxiliaires espagnols.

Ceux-ci auraient examiné les papiers des deux touristes britanniques, demandé à voir la caméra du médecin, puis auraient fait un geste intimant aux automobilistes de descendre de voiture. Ayant interprété ce geste comme une invite à poursuivre sa route, le Dr Peck démarra rapidement. C'est alors, toujours suivant l'auteur de l'article, que le plus jeune des deux auxiliaires de police, observant strictement la consigne qui lui avait été donnée de contrôler le passage de tous les véhicules franchissant le col de Tosa dans le voisinage duquel se déroulaient des manœuvres de l'armée franquiste, fit feu sur la voiture.

Montpellier 5 Août (AFP) - À propos de l'article publié par la "Dépêche du Midi" sur l'incident du col de Tosa, le commissaire Wattard, qui a dirigé les opérations policières en territoire français a notamment déclaré :

"Le champ des hypothèses est vaste. D'après ce que nous savons, le Dr Peck s'est arrêté parce qu'il a cru avoir à faire à des représentants d'autorité. Les agresseurs n'étaient point en uniforme, mais avaient des armes apparentes.

Il semble que le docteur ait mal interprété le geste des deux bandits qui lui firent signe de descendre de la voiture pour le fouiller et qu'il ait démarré. C'est alors que les deux hommes tirèrent dans sa direction. Cette explication donnerait priorité à la thèse d'un crime crapuleux, mais absolument rien ne permet de conclure qu'il s'agit d'une méprise de véritables policiers espagnols. En ce qui nous concerne, a ajouté le commissaire Wattard, l'enquête nous échappe, puisque le crime a eu lieu en territoire espagnol. Notre rôle s'est borné, avec nos C.R.S., à organiser des patrouilles deux heures environ après l'agression".

Londres, 7 Août (AFP) - Le docteur Bernard Peck, médecin de Plymouth, dont la femme a été tuée en Espagne près de la frontière le 25 juillet, a fait aujourd'hui, à Plymouth une déclaration à la presse.

Le Dr Peck est toujours à l'hôpital, et il parle encore avec difficulté par suite d'une fracture de la mâchoire due aux balles qui l'ont atteint.

Le Dr Peck a décrit la scène du meurtre de la manière suivante : "Lorsque nous sommes arrivés à un tournant, à quelques kilomètres de PuigCerdà, j'ai aperçu deux hommes vêtus d'une manière identique, d'un béret bleu marine, d'une veste et d'un pantalon bleu foncé, et portant des cartouchières en bandoulière.
J'ai eu nettement l'impression qu'il s'agissait moins de bandits que de membres d'une formation revêtus d'un uniforme.
Ils n'ont pas prononcé une parole
, a poursuivi M. Peck, qui a ajouté : "Les deux hommes paraissaient âgés l'un de 45 ans, et l'autre de 20 ans. Le plus vieux souriait d'une manière stéréotypée. Le plus jeune n'avait aucune expression et n'a joué qu'un rôle passif. Le plus vieux a passé sa tête à travers la portière dont la glace était baissée, et il a saisi mon appareil photographique. Il a ensuite reculé et fait un geste que j'ai interprété comme un signal qui m'indiquait de poursuivre ma route.
Le Dr Peck a ajouté :
"Lorsqu'il m'a fait signe, j'étais convaincu que je ne me trompais pas. Les derniers mots de ma femme ont d'ailleurs été : "Ils veulent que nous continuions notre route. Dépêche-toi". Quelques secondes après, Mme Peck s'effondrait sur son siège, atteinte de neuf balles.
Le Dr Peck était lui aussi atteint et a poursuivi sa route avec un pare-brise brisé. Le tir a cessé aussitôt que la voiture eut franchi le tournant suivant.
Le Dr Peck gravement blessé, a été sauvé, estime-t-il, grâce à l'initiative d'une Espagnole, d'origine américaine, qui a fait descendre un chirurgien de Barcelone d'un train passant par Puigcerdà. Ce chirurgien a procédé à deux longues interventions en utilisant seulement l'anesthésie locale.
Le Dr Peck a ajouté que les autorités espagnoles lui avaient montré le même jour, à l'hôpital de Puigcerdà, des photographies de suspects. Il a souligné aujourd'hui que ces photos étaient bien celles des meurtriers de sa femme. Les autorités lui ont déclaré que le plus âgé était connu sous le nom de Ramón Capdevila.

 

B. Éditorial du quotidien franquiste Arriba (extraits)

 

Les responsabilités

Toute l'Espagne a pris connaissance, avec une indignation mêlée de rage, du criminel attentat perpétré à la frontière hispano-française à l'encontre d'un couple anglais, auquel il n'a manqué que trois kilomètres pour terminer heureusement leurs vacances dans notre pays. L'identification de Ramón Vila, "Tête brûlée", dont on connaît les actes de vil malfaiteur au sein des organisations rouges, nous permet de ranger cet attentat au nombre des éléments de la propagande "politique" des ennemis de l'Espagne. Une série de photos de malandrins présentée par la Garde civile au Dr Peck a conduit notre police sur cette piste irréfutable.

Il est superflu de dire jusqu'à quel point nous plaignons le sort malheureux du couple, et combien nous déplorons cette tragédie, qui vient ajouter sa froide résonance à une série de faits moins retentissants et oubliés, qui ont frappé exclusivement des familles espagnoles. Ce crime frontalier, qui motive notre douloureux commentaire, tend à démontrer que le droit est du côté de l'Espagne dans son interminable série de réclamations vis-à-vis de l'attitude française concernant les problèmes de la frontière.

Quand, en 1951, les relations entre la France et l'Espagne se renouèrent, notre gouvernement présenta au pays voisin un très long mémorandum qui, dans les faits, ne faisait que reprendre les clauses de bonne conduite du protocole Jordana-Bérard(9).

Dans ce mémorandum, l'Espagne demandait des choses aussi élémentaires que la suppression des tristement fameuses écoles de terrorisme - par exemple celle de Toulouse, véritable Académie de barbarie et de sauvagerie ; l'extradition des criminels de droit commun réclamés par les tribunaux espagnols ; enfin, l'établissement d'une zone de courtoisie, matérialisée par la Loire, pour le plus grand bénéfice de l'ordre public(10). Les exilés de la guerre d'Espagne - tous ces gens qui commencèrent leur carrière avec de la dynamite, la poursuivirent lorsque nous avons entrepris notre croisade contre le crime, et qui, à la faveur de cet intense entraînement, continuent à signer leurs coups de diplômés ès terrorisme, sous la protection de la France - devraient être contenus au nord de cette ligne.

[L'éditorialiste poursuit en exigeant de la police française l'arrestation immédiate de "Tête brûlée" et de ses complices]

© Arriba du 29 juillet 1953

 

C. Communiqué de la C.N.T. espagnole en exil (extraits)

 

Au sujet de l'agression du col de la Tosa - Les criminels sont à rechercher parmi les Franquistes.

 

 



S'agissant de l'affaire du col de Tosa, et d'après les informations que publie la presse, on constate que les circonstances sont si étranges, que tout donne le droit de penser qu'il s'agit d'un crime préparé par des éléments franquistes pour l'exploiter à des fins politiques devant l'opinion internationale.

Nous affirmons catégoriquement que la CNT n'a rien à voir, ni de près ni de loin, avec ce crime. La CNT n'a aucun intérêt à ce qu'il se produise des incidents à la frontière, et ce n'est pas davantage l'intérêt des autres organisations anti-franquistes, car elles savent que le franquisme tire parti de ces incidents lors de ses récriminations vis-à-vis de la France, pays de liberté qui offre une hospitalité généreuse à tous les réfugiés politiques espagnols. Réfugiés qui ne peuvent vivre en Espagne parce que l'Espagne est soumise à un régime de terreur depuis de longues années, et qu'il n'existe dans ce pays aucune liberté politique ni civile, ni de droit pour les citoyens d'exprimer leurs opinions.

Qui a intérêt à ce que des incidents aient lieu à la frontière ? Le franquisme. Qui est bénéficiaire de tels incidents ? Le franquisme.

L'ignoble attentat dont ont été victimes le Dr Peck et son épouse est, nous avons la conviction morale, œuvre des franquistes.


[Le rédacteur développe ensuite l'idée que les franquistes se sont attaqués à une dame anglaise sans défense, car ils veulent que l'opinion britannique, qui n'apprécie pas outre mesure le franquisme, se retourne contre les anti-fascistes]

Ce sont les franquistes qui ont insinué immédiatement qu'un homme bien connu de la Résistance française et espagnole, Ramón Capdevila, connu de tout le monde, pourrait bien être l'auteur de l'agression. Dans quel intérêt ?

C'est précisément contre la C.N.T. que les franquistes dirigent tout particulièrement leurs réclamations diplomatiques, parce qu'ils savent pertinemment qu'il s'agit de l'organisation syndicale qui, en Espagne, reçoit le plus profond attachement de la part des travailleurs, que ce n'est pas une organisation communiste, et qu'elle n'a rien à voir avec les staliniens.

Il ressort des déclarations de la presse que le Dr Peck lui-même est dans l'incertitude, et n'affirme nullement que son agresseur soit effectivement Ramón Capdevila. Il est très possible que, pour jouer la scène de l'agression préparée par les éléments franquistes et combinée depuis longtemps, on ait cherché une personne qui lui ressemble physiquement pour mieux produire l'effet escompté.

D'autre part, n'est-il pas étrange que l'on ait simplement dérobé au docteur Peck son appareil photographique ? Ceux qui réclamèrent leurs papiers au docteur Peck et à sa femme, et qui ne pouvaient être que des éléments franquistes dans un endroit aussi fréquenté de la frontière espagnole, infesté de franquistes en uniforme ou en civil, craignaient-ils que la caméra du docteur Peck ne révèle quelque aspect de l'Espagne franquiste, que le franquisme désire garder secret ? Il serait, en outre, intéressant de savoir quelle personnalité ont cru découvrir les fascistes en la personne du docteur Peck.

[Le communiqué fait allusion au déraillement du funiculaire de Montserrat, et ironise : le franquisme met sur le dos des "terroristes" toute catastrophe survenant en Espagne, alors que le seul responsable est le gouvernement espagnol. Il rappelle aussi une autre catastrophe ferroviaire, celle de Mora de Ebro - lieu célèbre pour les combats acharnés qui s'y déroulèrent durant la guerre civile - que les franquistes avaient déjà essayé de mettre sur le compte des "terroristes", alors qu'elle n'était due qu'à la vétusté du matériel].

Un autre signe que l'attentat a été préparé par les franquistes, est que la presse indique qu'on a retrouvé un appareil émetteur près du véhicule, et un autre dans les environs de Montserrat. Si ce fait était avéré, il constituerait une preuve que les franquistes ont fomenté cet attentat du col de Tosa, en combinant de la manière la plus grossière une attaque contre les organisations anti-fascistes en exil.

Toute personne douée de bon sens, pour peu qu'elle réfléchisse, se rendra compte immédiatement du caractère du franquisme, et nous avons le droit de penser que l'affaire du Col est un fait préparé et même prémédité par le franquisme. Nous effectuons cette mise au point, bien que nous considérions l'opinion publique suffisamment clairvoyante pour ne pas se laisser désorienter par la propagande des agences et de la presse franquistes, et pour savoir à quoi s'en tenir, quant aux procédés totalitaires de terreur, qui ne méritent que la réprobation et la condamnation de toute conscience.

C'est précisément contre la C.N.T. Que les franquistes dirigent tout particulièrement leurs réclamations diplomatiques, parce qu'ils savent pertinemment qu'il s'agit de l'organisation qui, en Espagne, compte avec le plus profond attachement parmi les travailleurs, et que ce n'est pas une organisation communiste, et qu'elle n'a rien à voir avec les staliniens.

La C.N.T. a le plus grand intérêt à ce que la question du col de Tosa soit dûment éclairée.

 

 

Toulouse, le 30 juillet 1953

 

IV Analogies avec la tuerie de Lurs

 

Naturellement, les journalistes en mal de copie n'ont pas manqué de relever de "frappantes analogies avec l'affaire de Lurs", comme l'écrivit France-Soir du 28 juillet.

. Il y a tout d'abord l'évidence de l'époque, soit les vacances estivales ; à dix jours près, la date eût pu être identique.

. Il y a, cela va de soi, la nationalité des victimes : pourquoi cette voiture immatriculée en Grande-Bretagne alors qu'une centaine d'automobiles, environ, ont emprunté sans aucune difficulté, ce jour-là, la route qui conduit de la frontière française à Barcelone ?(11)

. Ce n'est pas un crime crapuleux, puisque rien n'a été dérobé, hormis un appareil photographique. Alors, quel est le mobile de cette agression ?

. Un appareil photographique a été dérobé, exactement comme dans l'affaire de Lurs.

. L'immédiate affluence des journalistes (français, anglais et américains) sur les lieux de la tragédie, comme la prise d'assaut des quelques cabines téléphoniques du bureau de Poste de Bourg-Madame renvoient à des faits identiques, survenus un an plus tôt à Peyruis.

. Comme à Lurs, c'est un radiesthésiste qui a montré ses talents : là-bas, pour découvrir (fortuitement) une balle, en contrebas de la voie ferrée ; ici, on a fait appel à un radiesthésiste français, habitant Dorres, pour retrouver les étuis (tous les étuis, dit-on !).

. Enfin, le journaliste Jacques Chapus, héros (héraut) de l'affaire de Lurs, est passé directement des Basses-Alpes aux Pyrénées-Orientales, car le voilà à pied-d'œuvre à Bourg-Madame, pour couvrir l'affaire du col de Tosa, télégraphiant régulièrement ses articles au quotidien parisien qui l'emploie.

. Il convient d'ajouter, last but not least, que certains, sans rire, ont avancé que cette nouvelle tragédie était (aussi) une affaire de services secrets, en s'appuyant sur des arguments, on va le voir, définitifs :

- le Dr Peck a fait preuve, dans ces tragiques circonstances, d'un sang-froid impressionnant, "qualité première que l'on demande d'avoir à un agent des services secrets anglais"(12).

- le Dr Peck a fui devant les "bandits", craignant que "le vol dont il serait victime pourrait permettre de découvrir des renseignements qu'il avait intérêt à cacher".

- le Dr Peck, incomplètement guéri, "a quitté Puigcerdà à la hâte", pour rentrer chez lui. Il a dû, pour ce faire, parcourir en ambulance, dans son état, 170 kilomètres de mauvaises routes, jusqu'à Barcelone(13).

- "il s'est dit" que le Dr Peck était porteur d'une très grosse somme (ce qui pourrait aussi renvoyer aux millions imaginaires que certains ont prêtés à Gaston Dominici)…

 

 

Comme on le voit, l'imagination des journalistes est sans bornes, quand il s'agit d'appâter le lecteur, ou de lui servir des billevesées à défaut d'informations sérieuses. Combien, dès lors, sont justifiées les réflexions d'A. Monestier : "La 'rubrique du sang', toujours présente [dans la presse] et toujours lue, répond à l'attente d'un immense public dont elle révèle la culture et la mentalité... La plupart des crimes passent inaperçus et se perdent, sitôt commis, dans un oubli irrémédiable... Les 'superstars' du crime ... se comptent, chaque siècle, sur les doigts d'une main [...]. La chronique judiciaire, c'est une évidence, parle aux tripes de ses lecteurs, elle est faite à plaisir pour hanter leurs rêves ; ceux qui la lisent forment un public essentiellement romanesque... Trouver des prétextes à frissonner, à s'émouvoir, à aimer et à haïr par procuration, voilà ce qu'ils demandent avant tout à leurs journaux... À la limite, ils préfèrent les eaux troubles, les coins d'ombre et le doute qui laissent leur esprit libre d'imaginer à sa guise. En fait, la vérité toute nue et tout entière les gênerait plutôt"(14).

Car il n'est venu à personne l'idée assurément simple - assurément trop simple - que les époux Peck, qui étaient de confession israélite, avaient entrepris un voyage d'ordre culturel : les régions visitées par eux - ou qu'ils avaient l'intention primitive de visiter - sont particulièrement riches en témoignages concernant les Juifs languedociens et catalans ayant vécu en Roussillon, Cerdagne et Catalogne, au Moyen-Âge, jusqu'à l'édit d'expulsion de 1492. Il est vrai que, nous avons maintes fois eu l'occasion de le remarquer, la culture et le journalisme forment deux domaines bien séparés.

La dépouille mortelle de Dora Peck, qui avait quitté Barcelone le 30 juillet 1953, fut inhumée à Cardiff (lieu de naissance des deux époux) dans le cimetière israélite de la ville.
Dans les années 70, le Dr Peck, toujours installé comme spécialiste en dermatologie à Plymouth, fut sollicité par l'hôpital de East Cornwall and West Devon (l'établissement même où il avait effectué ses études de médecine) pour intervenir deux fois par semaine en tant qu'assistant de clinique en dermatologie. Il a pris sa retraite de praticien en 1982.

Et maintenant, nous en savons assez pour dénoncer l'inanité de l'amalgame effectué par le journaliste "omniscient" du téléfilm scélérat diffusé à grands renforts de publicité en octobre 2003. Mais cela était couru d'avance, n'est-il pas ?

 

 


Notes

 

(1) Que Le Monde du 1er août, toujours prompt à l'hyperbole, transformera en mitrailleuses… Selon certaines informations, l'un des deux hommes était porteur d'une radio de campagne.
(2) De 9 m/m - et de provenance française, rapporta-t-on dans un premier temps, après l'examen des étuis - retrouvés grâce à un radiesthésiste ! Ce point fut ensuite controversé ; on ajouta que les étuis étaient de diverses provenances, ce qui, à coup sûr, trahissait le rechargement des munitions par des amateurs - mettons des "terroristes" espagnols. Et puis le silence fut fait sur cet aspect de l'attentat.
(3) Ramón Capdevila était présenté comme membre de la F. A. I.
La péninsule ibérique a toujours été une terre favorable à l'anarcho-syndicalisme. Notons en passant qu'une des causes de l'échec de la République espagnole, comme de la défaite, au bout de trois années de guerre civile, du camp républicain, a été la haine féroce opposant les staliniens aux anarchistes. La Fédération anarchiste ibérique (F.A.I.), fut créée en 1927. La C.N.T. (Confédération nationale du travail) - très puissant mouvement anarcho-syndicaliste durant la guerre civile), l'avait été en 1911.
Soupçonné d'être l'auteur de très nombreux attentats et sabotages en Catalogne, Ramón Vila Capdevila était né le 2 avril 1908 à Bezas (province de Barcelone). Taille : 1, 74 m, cheveux châtain foncé. Était amputé de l'auriculaire gauche.
(4) Ce "Boiteux", domicilié à Perpignan, où il tenait un commerce, tint à réfuter immédiatement les accusations qui étaient portées contre lui. Pour ce faire, il se rendit tout d'abord à la rédaction du journal local (l'Indépendant), puis à la police, afin de protester de son innocence, présentant des documents attestant des signalés services qu'il avait rendus à la Résistance française lors de la seconde guerre mondiale.
(5) Pour bien comprendre cette tragédie, on doit se souvenir que l'Espagne était, à l'époque, dirigée depuis quatorze années (et pour plus de vingt années encore) par la main de fer du général Franco, qui avait pris le pouvoir après s'être dressé contre les autorités socialistes, régulièrement élues. Les opposants les plus virulents à ce régime d'essence incontestablement fasciste (d'ailleurs, les fascismes italien et surtout allemand étaient venus prêter main-forte aux franquistes durant la guerre civile, de 1936 à 1939) étaient les anarchistes de la CNT et de la FAI, et les trotskistes antistaliniens du Poum (Parti ouvrier d’unification marxiste), pour lesquels la France constituait une commode base arrière. Ainsi, 5 à 6 000 anti-franquistes ('républicains espagnols', comme on disait depuis la chute du camp républicain, en 1939), vivaient à l'époque sur le sol français, implantés pour la plupart dans la région toulousaine.
(6) Par exemple Paris-Presse, l'Aurore, l'Indépendant de Perpignan, le Parisien libéré, Libération, etc. du 27 juillet, Le Monde du 28, etc.
(7) Comme le titra l'Aurore. France-Dimanche (n° 362, août 1953) ne craignit pas, hélas, de dramatiser, en risquant : "Lurs, cet été, s'appelle Puigcerdá". Comparaison n'est pas raison. Par ailleurs, sous l'annonce de la recherche du "terroriste espagnol" Cara Quemada, le Parisien libéré du 28 juillet annonce la prochaine érection d'un monument sur les lieux mêmes du triple crime de Lurs...
(8) Cette action avait eu lieu le 4 juillet précédent. En effet, sur ses gardes à la suite d'un attentat qui, le 26 juin, avait détruit plusieurs pylônes électriques dans les Pyrénées catalanes, la police avait repéré trois individus, armés de mitraillettes et de grenades, qui avaient clandestinement franchi la frontière. Il se disait que les documents saisis à cette occasion avaient permis à la police franquiste de découvrir une imprimerie clandestine anarchiste (où était éditée Solidaribad Obrera - Solidarité ouvrière) et d'y opérer de nombreuses arrestations selon certaines sources, d'abattre immédiatement les clandestins, selon d'autres sources.
(9) Protocole paraphé en février 1939 entre le ministre français Bérard et le ministre espagnol, le général Francisco Gómez Jordana y Sousa. Sénateur des "Basses-Pyrénées", élu à l'Académie française, Léon Bérard (1876-1960) fut brièvement ministre de Vichy, puis nommé ambassadeur auprès du Saint-Siège (1940-1944).
(10) C'est d'ailleurs ce que l'Espagne franquiste avait obtenu de la part du régime de Vichy, par les accords précités.
(11) En fait, seulement une dizaine de véhicules, environ, ont utilisé cette route entre seize et dix-sept heures. Tous les conducteurs auraient déclaré avoir aperçu deux hommes, ressemblant à des policiers ou des douaniers, montant en quelque sorte la garde. Et l'un d'eux, un commerçant espagnol, dit même avoir reconnu "Tête brûlée". Aucun de ces véhicules n'a été "contrôlé". Par ailleurs, remarquons qu'il est relativement difficile d'apercevoir la plaque "GB" d'un véhicule, lorsqu'on le voit s'approcher…
(12) Cette perle se trouve dans l'Indépendant de Perpignan, livraison du 2 août 1953. Très vraisemblablement, le journal n'a fait que reprendre, en les amplifiant peut-être, des " informations " parues dans un quotidien de Barcelone
En fait, on en vient à se demander si cette qualité n'est pas requise pour les agents secrets de toute nationalité…
(13) Le Dr Peck a quitté Barcelone par avion, le 31 juillet au soir, soit une semaine après la tragédie qui coûta la vie à sa jeune épouse.
(14) Alain Monestier, Les grandes affaires criminelles, Bordas éditeur, 1988, pp. 8-9.