Concerne la fin du cycle III

 

I. Document de départ

 

De toutes parts arrivaient jusqu'à moi de petits bruits. Une branche craquait, une pierre changeait de place et, dans la maison, parfois un objet remuait un peu. La charpente se dilatait et la toiture, qui avait bien souffert de la chaleur pendant le jour, soupirait d'aise. Le long des murs glissaient furtivement des bêtes. Elles sortaient à la fraîcheur pour respirer et pour regarder une ou deux étoiles... J'entendis aussi (et il était tard) une plus grosse bête. Elle vint sur le toit et ses pattes, en touchant les tuiles, les faisaient cliqueter. Dans le jardin, une autre, bien plus grosse encore, traversa une broussaille. Elle la fouilla vigoureusement. Je ne la vis pas ; mais elle s'approcha de la maison ; et je l'entendis qui soufflait, tout près du puits. La lune avait déjà baissé, quand un petit troupeau passa sur le chemin. J'allais m'endormir, mais le bruit des clarines me tint éveillé... On imaginait les brebis, errant, en quête d'une touffe d'herbe calcinée, sur ce sol rocailleux que touchaient les rayons de la lune déclinante. Petit à petit les sons s'éloignèrent. Le troupeau disparut au loin dans le silence. Il n'y eut plus, pour animer ma solitude, que l'écho intérieur dont le passage de ces bêtes lentes avait tracé, dans ma mémoire, les sons légers. Et ainsi je n'entendais plus qu'un souvenir.

Après quoi, ce fut le sommeil. Mais je n'y perdis point le sentiment de mon existence engourdie. Je restai en vue de moi-même ; et, tout en prenant mon repos, je jouissais d'y fondre ma fatigue... Ma lassitude se changeait en abandon, et l'abandon me donnait un sentiment tendre de la vie confuse, de cette vie où je flottais, comme, sur une eau calme, flotte un bouchon de liège.

Ce fut la nuit la plus douce de mon existence. Il m'en est resté l'amour du sommeil sous les arbres, et une modération à dormir qui m'empêche de me dissoudre dans les profondeurs de la nuit, quand je lui confie mon repos.

 

Henri Bosco (1888-1976), Antonin (écrit en février 1951)].

 

 

1. Préparation lexicographique du texte.

 

Il y a 353 mots dans ce texte, dont 198 différents.

 

On recense d'abord 209 occurrences de mots-outils (dont 69 différents), soit 59 % du texte :

 


15 de
14 la
11 le
10 et
9 une
8 je, les
6 en, un
5 plus, dans
4 à, sur, l', mon, ma, d'
3 y, ce, avait, des, elle, qui, il , pour, mais, me, m', petit, n'
2 bien, du, moi, j', que, quand, fut, s', se, tout
1 au, allais, autre, eut, cette, ces, comme, deux, donnait, elles, est, était, faisaient, jour, lui, même, ne, on, ou, où, pas, vue, petits, prenant, qu', ses, toutes, vint, vis.

 

Il y a d'autre part 144 mots 'pleins' (dont 129 différents) :


2 occurrences : changeait, maison, bêtes, grosse, entendis, lune, troupeau, sons, sommeil, sentiment, existence, repos, nuit, abandon, vie
1 occurrence : flotte, calme, eau, confuse, flottais, bouchon, tendre, liège, lassitude, fatigue, jouissais, fondre, douce, engourdie, restai, resté, amour, perdis, point, sous, quoi, après, souvenir, ainsi, légers, mémoire, tracé, lentes, passage, dont, intérieur, écho, solitude, animer, silence, loin, éloignèrent, disparut, arbres, déclinante, rayons, touchaient, rocailleux, sol, calcinée, herbe, touffe, quête, errant, brebis, imaginait, éveillé, tint, clarines, bruit, endormir, passa, chemin, modération, déjà, baissé, dormir, puits, soufflait, près, empêche, approcha, vigoureusement, fouilla, broussaille, traversa, encore, jardin, cliqueter, tuiles, touchant, pattes, bête, toit, dissoudre, tard, aussi, entendis, étoiles, regarder, respirer, sortaient, fraîcheur, profondeurs, furtivement, glissaient, murs, long, aise, soupirait, pendant, chaleur, souffert, toiture, dilatait, charpente, peu, remuait, parfois, objet, confie, place, parts, pierre, craquait, branche, bruits, arrivaient, jusqu'


Ou, par ordre alphabétique :


ainsi, aise, amour, animer, approcha, après, arbres, arrivaient, aussi, baissé, bête, bouchon, branche, brebis, broussaille, bruit (bruits), calcinée, calme, chaleur, charpente, chemin, clarines, cliqueter, confie, confuse, craquait, déclinante, déjà, dilatait, disparut, dissoudre, dont, dormir, douce, eau, écho, éloignèrent, empêche, encore, endormir, engourdie, entendis, errant, étoiles, éveillé, fatigue, flotte (flottais), fondre, fouilla, fraîcheur, furtivement, glissaient, herbe, imaginait, intérieur, jardin, jouissais, jusqu', lassitude, légers, lentes, liège, loin, long, mémoire, modération, murs, objet, parfois, parts, passa, passage, pattes, pendant, perdis, peu, pierre, place, point, près, profondeurs, puits, quête, quoi, rayons, regarder, remuait, respirer, restait (resté), rocailleux, silence, sol, solitude, sortaient, souffert, soufflait, soupirait, sous, souvenir, tard, tendre, tint, toit, toiture, touchaient (touchant), touffe, tracé, traversa, tuiles, vigoureusement

 

 

2. Lisibilité

 

Le texte est, statistiquement, accessible un peu au-delà du CM2 ; son niveau de lisibilité est de 10, 57, avec une moyenne de 18, 67 mots par phrases, et 6, 85 % de mots absents du vocabulaire fondamental.

 

 

II. Suggestions pour une exploitation

 

1. Explicitation du texte

 

Il conviendra de s'attacher longuement à une compréhension préliminaire assez fine de ce texte. On pourra faire relever les 'petits' bruits, les bruits proches, les bruits qui se rapprochent, ceux qui s'éloignent. On s'appuiera, pour ce faire, sur les verbes : approcha, traversa, s'éloignèrent, disparut. On ira peut-être, pour les élèves les plus avancés, jusqu'à faire noter le croisement passé simple/imparfait (avec prudence). On fera aussi remarquer le passage du réel à l'imaginaire. Enfin, on pourra faire trouver un titre convenant à cet extrait

 

 

2. Vocabulaire en extension

 

On pourra faire relever l'opposition entre chaleur du jour et fraîcheur de la nuit, et travailler avec les élèves, au-delà des termes trouvés dans le texte, sur ces champs lexicaux, tout en insistant sur les antonymes (on n'oubliera pas la compréhension de la phrase : la toiture... soupirait d'aise. On fera rechercher un synonyme de la lune avait déjà baissé).

 

3. Vocabulaire en compréhension

 

a. le verbe perdre :

 


on pourra éventuellement faire construire une grille. Quelques suggestions sur les nuances de sens, sur l'opposition propre/figuré, en particulier :

- perdre un objet (ne plus le retrouver), égarer.

- perdre un ami : causer sa perte (sa ruine, son déshonneur), ou le perdre à cause de son décès, ou le perdre par rupture d'amitié, ou encore le perdre au milieu d'une foule.

- perdre la tête, perdre le nord, s'affoler.

- perdre connaissance (conscience), s'évanouir.

- perdre de l'argent au jeu, se ruiner.

- perdre aux cartes.

- être perdu : soit, au sens propre, ne pas retrouver son chemin ; soit, au sens figuré, être proche de la mort.

- perdre pied : soit ne plus avoir pied, lors d'une baignade, soit ne plus arriver à suivre (en classe...).

- perdre la mémoire, oublier.

- perdre toute volonté.

- perdre son temps.

- perdre quelqu'un de vue.

- perdre du poids.

- perdre (fuir, ex. le seau perd).

- .......

 

b. le morphème lexical chaud

 


(dénomination interne aux adultes !)

On pourra déployer en éventail cinq morphes, et faire rechercher, oralement puis sur le dictionnaire, par équipes, dérivés et composés :

 

ø chaud ø
chauff
chaleur
calor
therm

 

(ce pourra être l'occasion de noter, sans insistance particulière, les origines latine et grecque de notre langue, particulièrement dans les dérivés dits savants).

 

4. Prolongements éventuels

 

À partir du mot bête. On pourra faire compléter (élèves les plus avancés) un tableau de collocations (emprunté à J. Picoche) :

 

Nom spécifique Âne Cheval Mulet Bœuf Chèvre Mouton Porc Chat Chien Lapin Poule Canard
Mâle âne étalon mulet taureau bouc bélier verrat chat chien lapin coq canard
Femelle   jument mule vache chèvre brebis truie chatte chienne lapine poule cane
Jeune     Ø                  
Parturition Ø   Ø vêler chevreter agneler cochonner chatonner chienner lapiner Ø Ø
Portée Ø Ø Ø Ø Ø Ø cochonnée     portée, nichée couvée  
Gardien ânier Ø       berger   Ø Ø Ø Ø Ø
Local Ø écurie écurie bouverie, étable, vacherie étable bergerie toit, soue, porcherie, cochonnier Ø cheni, niche lapinière, clapier poulailler poulailler
Cri braire hennir Ø

mugir

meugler

bêler, chevroter bêler grogner miauler aboyer clapir, couiner glousser, caqueter cancaner, nasiller