Concerne le cycle III - il s'agit d'une épreuve (début des années soixante) pour l'examen d'entrée en sixième, le C.E.P. et le concours des bourses.

 

 

 

I. Document de départ

 

 

C'est après une gelée blanche que les premières feuilles tombent ; une petite pluie fine accélère leur chute.

On ne sent pas un souffle d'air. Pourquoi les feuilles du marronnier tombent-elles ainsi, une à une, régulièrement ? Est-ce à la volonté de l'arbre muet qu'elles se détachent ? Fait-il le compte des feuilles à rendre ? Regardez-le bien et devinez celle qui va tomber. C'est toujours une autre feuille qui tombe.

Il faut, pour qu'elle tombe, tirer celle-là par l'oreille.

Le peuplier qui est dans le canal, la tête en bas, attire à ses branches les feuilles du peuplier qui est au bord du canal, la tête en haut.

Les feuilles tombent dans la rivière, glissent au fil de l'eau et s'éloignent. Elles aussi, elles émigrent.

Ce bouleau tremble-t-il de froid ? Est-ce qu'il rêve ?

Toutes les branches de celui-là dorment. Seule, au bout, là-haut, une petite branche de l'année s'agite et ne veut pas dormir.

Une feuille entrait chez moi par la fenêtre ouverte : je l'ai prise et relâchée.

On entend le bruit d'une feuille par terre : elle essaie un vol de pauvre oiseau qui n'aurait qu'une aile et une patte. Celle-là se sauve comme un rat qui cherche son trou.

Soudain, c'est une débandade ; des troupes de feuilles fuient, affolées, comme si l'hiver était là, au coin du bois.

Ce frêne est déjà tout nu, comme une fourchette.

Un temps d'arrêt : les dernières feuilles se cramponnent ; ainsi qu'au chevet d'un malade dont l'agonie sera longue, on s'est désespéré trop vite. On reste triste, mais on pense un peu à autre chose et on attend.

Est-ce que tout va s'effacer ?

Pour les mystères de sa métamorphose, la nature s'enveloppe d'une brume épaisse où les corbeaux nagent et crient au secours.

Sur les pauvres qui rentrent pour l'hiver, la maison basse ferme son toit comme deux ailes.

 

 

[Jules Renard (1864-1910), in Ragotte, Gallimard, 1908].

 

 

I.1. Préparation lexicographique du texte

 

Il y a 147 mots dans ce texte, dont 125 différents (sans les mots-outils : il y a par ailleurs 194 occurrences de mots-outils - dont 60 différents, soit 56, 89 % du texte).

7 occurrences : feuilles (+ 3 feuille)

5 occurrences : là

3 occurrences : tombent (+ 2 tombe)

2 occurrences : ainsi, peuplier, canal, tête, branches, haut, hiver,

1 occurrence  : accélère, affolées, agite, agonie, aile, ailes, air, année, après, arbre, arrêt, attend, attire, aussi, bas, basse, blanche, bois, bord, bouleau, bout, branche, bruit, brume, cherche, chevet, chez, chose, chute, coin, compte, corbeaux, cramponnent, crient, débandade, déjà, dernières, désespéré, détachent, devinez, dont, dorment, dormir, eau, effacer, éloignent, émigrent, entend, entrait, enveloppe, épaisse, essaie, faut, fenêtre, ferme, fil, fine, fourchette, frêne, froid, fuient, gelée, glissent, longue, maison, malade, marronnier, métamorphose, muet, mystères, nagent, nature, nu, oiseau, oreille, ouverte, patte, pauvre, pauvres, pense, peu, pluie, pourquoi, premières, rat, regardez, régulièrement, relâchée, rendre, rentrent, reste, rêve, rivière, sauve, secours, sent, seule, soudain, souffle, temps, terre, tirer, toit, tomber, toujours, tremble, triste, trop, trou, troupes, vite, vol, volonté.

 

I.2. Lisibilité

 

Le texte très accessible : un niveau de lisibilité de 8, 03 le place au niveau des classes de CM1-CM2 (mots par phrases : 13, 92 ; pourcentage de mots absents du vocabulaire fondamental : 5, 09 %).


Mots absents du vocabulaire de base :

accélère, affolées, agonie, bouleau, canal, chevet, cramponnent, débandade, détachent, devinez, émigrent, fine, frêne, métamorphose, peuplier, régulièrement, relâchée

 

 

II. Quelques suggestions pour une exploitation

 

I. Questions (entrée en sixième)

 



VOCABULAIRE.

- a) Relevez les comparaisons qui figurent dans ce texte.

- b) Pourquoi l'auteur dit-il que "les feuilles émigrent" ; que les dernières feuilles "se cramponnent" ; que "les corbeaux nagent et crient au secours" ?

- c) Quelle différence de sens y a-t-il entre tirer et attirer ? Précisez en plaçant ces deux verbes dans une courte phrase.


CONJUGAISON.

- a) Mettez le paragraphe "Les feuilles tombent.., elles émigrent", au passé simple.

- b) Écrivez au conditionnel présent et au futur simple la phrase : "Ce bouleau tremble-t-il de froid ?"

- c) Écrivez l'infinitif des verbes du deuxième paragraphe. À quel temps sont les verbes regardez et devinez ?


ANALYSE.

- a) Indiquez la fonction des quatre compléments qui se trouvent dans le dernier paragraphe.

- b) Relevez les adjectifs qualificatifs du premier paragraphe.

- Quelle est la fonction de l'adjectif qualificatif longue dans "l'agonie sera longue" ?

- c) Relevez les pronoms sujets des verbes du deuxième paragraphe.


INTELLIGENCE DU TEXTE.

- Dans ce texte, l'auteur fait "vivre" les arbres et les feuilles ; recherchez les détails où ce caractère est marqué. Quel sentiment éprouvez-vous en voyant tomber les feuilles ?

 

II. Questions (Certificat d'études primaires et Concours des Bourses)

 


ORTHOGRAPHE.

- a) affolées (feuilles affolées). Tous les mots commençant par af prennent deux f. Écrivez ceux que vous connaissez. Deux mots font exception : quels sont-ils ?

b) Le mot métamorphose s'écrit avec le groupe de lettres-consonnes ph pour f. Écrivez les mots que vous connaissez et qui présentent la même particularité.

c) Dans le texte on rencontre c'est, s'est, ses. Quand emploie-t-on ces locutions et ce mot ? Quand emploie-t-on ces ?
Écrivez les trois premières personnes du verbe savoir au présent de l'indicatif.


ANALYSE.

- a) Dans la phrase : "Les feuilles tombent dans la rivière, glissent au fil de l'eau et s'éloignent", quelle est la nature des propositions et comment se présentent-elles par rapport l'une à l'autre ?

- b) Fonction de seule ("seule, au bout, là-haut").

 

III. Travaux sur composition/dérivation

 

Les verbes tirer (Dubois-Buyse, échelon 18) et attirer (Dubois-Buyse, échelon 19)

 

 ø    er
 at    age
 é  tir(r)  oir
 sou    ance
     ement