Consigne : d'abord découvrir les contraintes - au nombre de trois - qui structurent les textes suivants, et s'efforcer, dans un second temps, de produire des écrits personnels en les respectant.

 

 

"Décédé, le mec ? Permettez ! En cette ère de lettres blêmes et de best-sellers dégénérés, ses textes expertement pervers restent présents. L'éphémère de Pérec est éternel. Défense de l'enterrer"

 

 

 

I. Maxime dîne ce matin avec Anatole.

 

- Je me régale, dit-il à son ami. J'adore l'arôme de ce potage de légumes à l'anis. On y tâte de l'acidité délicate du rutabaga, de l'acidulé rare du céleri-rave caramélisé, de la sapidité paradoxale de la tomate des Yvelines, et une légère marinade de cari, basilic et origan a su le revigorer. Avec une matelote de mulet, une salade de macaroni, la carafe de rosé du Médoc, une petite fine du Jura, le géromé, le livarot, un ananas, une banane, du café, ce sera super !

 

 

II.

 

À demi-mot un art chétif nous parle,

ci nouant le strict opus à ce frisson fugace,

t'inoculant ce simoun blanc,

tels vingt blocs d'un marbre si lourd à sertir

hors du tracé gris où l'avenir gourd

sans répit nous mâche

ni croc d'un art bref

ni mort brunâtre

ni l'outrage inconnu :

l'Ange introuvable,

cri troublant cet îlot sûr (1)

 

 

III. La disparition

 

Un grand nom du roman a disparu, on sait qui : juif polonais par son papa, ou sa maman, va savoir, poisson astral du front populo, car il naquit sur un sol français un six mars sous Blum, il fut un fou dingo du stylo, abracadabrant mais pas bavard pour un sou, scribouillard subtil dont la main animait l'ambition sans faiblir, jamais mondain quoiqu'il jouît d'un nom sonnant aux tympans du public, du moins d'un public acquis à son original travail, nonobstant l'oubli où tout, un jour, finit.

Clown magistral du mot, archiduc du canular, roi au Point, journal où il officiait, du croisillon sans point noir, plumitif hors du commun mais jamais obscur, ni a fortiori abscons, il fit à l'Oulipo grand foin. Il avait surtout là-bas pour ami Italo Calvino, mandons pardon aux omis qui sauront sans mal nous saisir... (2)

 

 


 

Notes

1 . G. Pérec, Nouvelles Littéraires, août 1979.

2. J. L. Zin, Nouvelles Littéraires, mars 1982.