Elena, jeune femme d'extraction particulièrement modeste et qui a réussi, à force de travail opiniâtre, à décrocher les plus hauts grades universitaires - modèle de ce qu'on nommait naguère chez nous "l'élitisme républicain" - est invitée par une amie "branchée" à prendre la parole, dans un amphi soixante-huitard où l'on refait bruyamment le monde, faute de pouvoir se changer soi-même. L'ambiance qui règne dans cet amphi - peuplé de fils de bourgeois n'ayant absolument aucune connaissance de ce "peuple" qu'ils prétendent défendre, et même incarner - fait irrésistiblement songer à la séquence qui ouvre le célèbre et très soixante-huitard Zabriskie Point. Elena s'y sent étrangère, et combien on la comprend ! Après avoir renoncé à prendre la parole - qu'en tout état de cause personne n'avait le désir de lui passer - elle quitte ce lieu aussi brouillon que délétère, après avoir croisé un ancien amant, et sa nouvelle et éphémère compagne.

 

 [...] Je récupérai ma valise à la maison d’édition et passai à l’hôtel. Je n’y restai que quelques minutes avant de sortir à nouveau pour me rendre à mon rendez-vous.

À l’université, il faisait une chaleur insupportable, et je me retrouvai cernée d’affiches couvertes de slogans, de drapeaux rouges et d’images de peuples en lutte, d’écriteaux annonçant toutes sortes d’initiatives, et surtout plongée dans le brouhaha, les rires et un état d’alerte diffus mais palpable. Je me souviens d’un garçon brun qui, dans sa course, me bouscula rudement : il perdit l’équilibre, se rétablit et puis s’enfuit dans la rue comme s’il était poursuivi, alors qu’il n’avait personne à ses trousses. Je me rappelle la note solitaire d’une trompette, très pure, qui transperçait l’air étouffant. Je revois une petite blonde qui traînait bruyamment une chaîne dont l’extrémité était munie d’un gros cadenas et qui criait à je ne sais qui, débordante de bonne volonté : j’arrive ! Je m’en souviens parce que, obligée d’attendre que quelqu’un me reconnaisse et s’approche de moi, j’avais sorti mon carnet pour me donner une contenance et notai ceci ou cela. Mais une demi-heure s’écoula et nul n’arriva. Alors j’examinai affiches et écriteaux plus attentivement, espérant trouver quelque part mon nom ou le titre du roman. En vain. Un peu nerveuse, je renonçai à aborder un étudiant, honteuse de citer mon nom comme objet de discussion dans une atmosphère où toutes les annonces tapissant les murs traitaient de thèmes bien plus importants. Je me sentais désagréablement tiraillée entre deux sentiments contraires : d’un côté, une forte sympathie pour tous ces garçons et ces filles qui se permettaient, en ces lieux, des gestes et des paroles d’une indiscipline totale, et de l’autre, la peur que le désordre que je fuyais depuis mon enfance puisse, ici même, me rattraper et me pousser au beau milieu de ce chaos ; alors un représentant du Pouvoir absolu – un Surveillant, un Professeur, le Recteur, la Police – interviendrait, me prendrait en faute – oui, moi qui avais toujours eu un comportement exemplaire ! – et me punirait.

Je songeai à m’éclipser : que pouvait bien m’importer une poignée d’étudiants à peine plus jeunes que moi, à qui j’aurais raconté les bêtises habituelles ? Je voulais rentrer à l’hôtel, et profiter de ma condition d’écrivain rencontrant un certain succès, qui voyageait beaucoup, mangeait au restaurant et dormait à l’hôtel. Mais un groupe de cinq ou six filles passa alors, elles avaient l’air affairées et portaient toutes sortes de sacs, et presque sans le vouloir je les suivis : je suivis leurs voix, leurs cris, et aussi le son d’une trompette. Ainsi, après un long cheminement, je finis devant la porte d’une salle bondée, juste au moment où une clameur chargée de colère s’élevait. Comme les étudiantes qui me précédaient entrèrent, je franchis moi aussi le seuil, avec précaution.

Un conflit très dur était en cours entre différentes factions, à la fois dans la salle pleine à craquer et parmi la petite foule qui assiégeait la chaire. Je restai près de la porte, prête à décamper, rebutée par une brume brûlante de fumée et de respiration mêlées, et par une puissante odeur d’excitation.

J’essayai de comprendre ce qui se passait. On discutait, je crois, de questions de procédure, mais dans une ambiance où personne ne semblait imaginer un quelconque accord possible – ça hurlait, ça se taisait, on raillait, on riait, certains couraient ici et là comme autant de messagers sur un champ de bataille, d’autres ne prêtaient attention à rien, quelques-uns encore étudiaient. J’espérai apercevoir Mariarosa quelque part. En attendant, je m’habituai au vacarme et aux odeurs. Il y avait tellement de monde ! C’étaient surtout des garçons, beaux, laids, élégants, négligés, violents, apeurés ou amusés. J’observai les filles avec curiosité et j’eus l’impression d’être la seule à ne pas être accompagnée. Certaines – par exemple celles que j’avais suivies jusqu’ici – restaient en groupes compacts, même lorsqu’elles distribuaient des prospectus dans la salle bondée : elles criaient ensemble, riaient ensemble, et quand elles se séparaient de quelques mètres, elles continuaient à se surveiller du coin de l’œil, pour être sûres de ne pas se perdre de vue. Amies de longue date ou connaissances occasionnelles, elles avaient l’air de tirer du groupe la permission même d’être en ce lieu de chaos. Séduites par ce climat de désordre, elles s’ouvraient à cette expérience à la seule condition de ne pas être séparées, comme si elles avaient décidé à l’avance, dans des espaces plus sûrs, que si une seule s’en allait, elles partaient toutes. D’autres au contraire, arrivées seules ou à deux, avaient rejoint des bandes de garçons : elles affichaient une intimité provocatrice et l’élimination joyeuse des distances bienséantes. Elles me paraissaient les plus heureuses, les plus agressives et les plus fières de toutes.

J’eus l’impression d’être différente, et ma présence me parut illégitime. Je ne me sentais pas le droit de crier de concert, ni de rester dans cette chaleur et ces odeurs qui, à présent, me rappelaient les odeurs et la chaleur émanant du corps d’Antonio et de son souffle, lorsque nous nous étreignions aux étangs. J’avais été trop misérable et trop écrasée par la nécessité d’exceller dans les études. J’étais très peu allée au cinéma. Je n’avais jamais acheté de disques, comme j’aurais aimé le faire. Je n’étais pas devenue fan de chanteurs et n’avais jamais couru à des concerts. Je n’avais pas collectionné d’autographes, n’avais jamais été ivre, et le peu de fois où j’avais fait l’amour, cela avait été à l’aide de mille subterfuges, mal à l’aise et apeurée. Ces filles au contraire, à un degré ou un autre, devaient avoir grandi dans une certaine aisance, et elles étaient parvenues à leur mue actuelle bien mieux préparées que moi. Elles devaient ressentir leur présence en ces lieux, dans cette ambiance, non pas comme un déraillement mais comme un choix juste et nécessaire. Maintenant que j’ai un peu d’argent, me dis-je, et que j’en gagnerai peut-être beaucoup plus, je peux essayer de rattraper le temps perdu. À moins que ce ne soit impossible – qui sait si je ne suis pas désormais trop cultivée, trop ignorante, trop contrôlée, trop habituée à maîtriser la vie en emmagasinant idées et données, trop près du mariage et de l’installation définitive, bref trop satisfaite et obtuse, prisonnière d’un ordre qui paraissait pourtant ici à son crépuscule. Cette dernière pensée m’effraya. Il faut tout de suite que je parte, pensai-je, ici le moindre geste et la moindre parole sont autant de claques en réponse à tous mes efforts ! Or, j’avançai au contraire à l’intérieur de la salle pleine à craquer.

Je remarquai immédiatement une jeune fille très belle, aux traits délicats, avec de longs cheveux noirs sur les épaules, certainement plus jeune que moi. À partir de l’instant où je l’aperçus, je ne la quittai plus des yeux. Elle était debout au milieu de jeunes très combatifs, et derrière elle se tenait, tel un garde du corps, un homme brun d’une trentaine d’années qui fumait le cigare. À part sa beauté, ce qui la distinguait, dans cette ambiance, c’était qu’elle avait dans les bras un bébé de quelques mois, qu’elle allaitait en suivant attentivement le débat en cours, criant parfois quelque chose à son tour. Quand l’enfant, une petite chose bleue avec des jambes et des pieds nus tout rouges, détachait la bouche de son mamelon, elle ne remettait pas le sein dans son soutien-gorge mais restait ainsi, exposée, corsage blanc déboutonné, poitrine turgescente, sourcils froncés et bouche entrouverte, jusqu’à ce qu’elle se rende compte que son bébé ne tétait plus, après quoi elle tentait machinalement de le remettre au sein.

Cette fille me troubla. Dans cette salle bruyante et enfumée, elle apparaissait comme une sorte d’icône de la maternité, tout à fait déplacée. Elle était plus jeune que moi, avait l’air d’une personne très délicate et avait déjà la responsabilité d’un enfant. Mais elle me semblait surtout occupée à contredire l’image de la jeune femme placide entièrement absorbée par les soins de son bébé. Elle criait, gesticulait, prenait la parole, riait de colère ou désignait quelqu’un avec mépris. Et pourtant, son enfant était une partie d’elle-même, il cherchait son sein et le perdait. Ensemble, ils formaient une image tremblante et fragile, prête à se briser, comme si elle était peinte sur du verre : le bébé allait lui tomber des bras, ou bien quelque chose – un coude, un geste incontrôlé – allait lui cogner la tête. Je fus contente lorsque, tout à coup, Mariarosa fit son apparition à son côté. Enfin, la voilà ! comme elle est vive et chaleureuse, et comme elle explose de couleurs ! Elle manifesta une grande familiarité avec la jeune mère. J’agitai la main mais elle ne me vit pas. Elle parla un moment à l’oreille de la fille, puis disparut pour ressurgir parmi ceux qui se disputaient autour de la chaire. Pendant ce temps, arrivant par une porte latérale, un petit groupe fit irruption dans la salle, et sa seule entrée suffit à calmer un peu les esprits. Mariarosa fit un signe, attendit qu’on lui en adresse un autre en retour, après quoi elle saisit le mégaphone et prononça quelques mots qui apaisèrent définitivement l’assistance survoltée. À ce moment-là, et pendant quelques secondes, j’eus l’impression que le mélange de Milan, des tensions de cette période et de ma propre excitation, était tellement puissant qu’il allait me permettre d’expulser les ombres qui m’encombraient la tête. Combien de fois avais-je songé, ces derniers jours, à ma première éducation politique ? Mariarosa passa le mégaphone à un jeune homme qui s’était approché d’elle et que je reconnus immédiatement. C’était Franco Mari, le fiancé de mes premières années à Pise.

Il était resté le même : je reconnus le ton chaleureux et persuasif de sa voix, ainsi que sa capacité à organiser son discours en partant de propos généraux qui, de fil en aiguille, débouchaient imparablement et aux yeux de tous sur des expériences quotidiennes dont il révélait tout le sens. En écrivant aujourd’hui, je m’aperçois que j’ai très peu de souvenirs de son physique, à part son visage pâle et glabre et ses cheveux courts. Et pourtant, à l’époque, son corps était le seul que j’avais enlacé comme si nous étions mariés.

Après sa harangue, je m’approchai de Franco. Ses yeux brillèrent de surprise et il me serra dans ses bras. Mais nous eûmes du mal à nous parler : quelqu’un attira son attention, et un autre jeune se mettait déjà à discourir âprement, tout en le désignant du doigt avec insistance, comme s’il devait répondre de fautes horribles. Je restai avec le groupe près de la chaire, mal à l’aise, et dans la cohue je perdis de vue Mariarosa. Mais cette fois, c’est elle qui me repéra et me tira par le bras.

"Qu’est-ce que tu fais ici ?" demanda-t-elle, joyeuse.

J’évitai de lui expliquer que j’avais raté un rendez-vous et étais arrivée là par hasard. Je répondis en indiquant Franco :

"Je le connais, lui !

— Mari ?

— Oui !"

Elle me parla de Franco avec enthousiasme, puis me chuchota à l’oreille : ils vont me le faire payer, c’est moi qui l’ai invité, regarde ce panier de crabes… Et comme il était prévu qu’il dormirait chez elle avant de repartir pour Turin le lendemain, elle insista aussitôt pour que je vienne dans son appartement moi aussi. J’acceptai – et tant pis pour l’hôtel.

L’assemblée traîna en longueur, tout le monde était en alerte permanente et il y eut des moments de grande tension. Nous quittâmes l’université à la tombée du jour. En plus de Franco, vinrent aussi avec Mariarosa la jeune mère, qui s’appelait Silvia, et l’homme d’une trentaine d’années que j’avais déjà remarqué dans la salle en train de fumer le cigare, un peintre vénézuélien qui s’appelait Juan. Nous allâmes tous dîner dans une auberge que connaissait ma belle-sœur. Je discutai suffisamment avec Franco pour réaliser que je m’étais trompée et qu’il n’était plus le même. On aurait dit qu’on lui avait collé un masque sur le visage – à moins qu’il ne se le fût collé lui-même – qui, certes, épousait parfaitement ses traits d’autrefois, mais qui avait effacé toute sa générosité. À présent, il était plein de retenue, crispé, et soupesait chacun de ses mots. Au cours d’un bref échange plutôt intime, il ne fit aucune allusion à notre ancienne relation, et lorsque je l’évoquai, me plaignant qu’il eût cessé de m’écrire, il coupa court en murmurant : cela devait se passer comme ça. Sur ses études aussi il fut vague, et je compris qu’il n’avait pas de diplôme.

"Il y a autre chose à faire ! fit-il.

— Quoi, par exemple ?"

Alors il s’adressa à Mariarosa, presque agacé de la tournure trop privée qu’avait pris notre échange :

"Elena demande ce qu’il faut faire !"

Mariarosa répondit, allègre :

"La révolution !"

Alors je pris un ton ironique et lançai :

"Et pendant le temps libre ?"

Juan intervint, sérieux, secouant doucement le poing fermé du bébé de Silvia, assise près de lui :

"Pendant le temps libre, on la prépare."

Après dîner, nous nous serrâmes tous dans la voiture de Mariarosa, qui habitait à Sant’Ambrogio, dans un vieil appartement très spacieux. Je découvris que le Vénézuélien y avait une espèce d’atelier, une pièce fort désordonnée que Mariarosa nous fit visiter, à Franco et moi, afin de nous montrer ses œuvres : de grandes toiles avec des scènes urbaines pleines de personnages, accomplies avec un réalisme presque photographique, que cependant il avait gâchées en clouant par-dessus des tubes de peinture, des brosses, des palettes, des gobelets pour la térébenthine et des chiffons. Mariarosa le couvrit d’éloges, mais en s’adressant principalement à Franco, à l’opinion duquel elle semblait tenir beaucoup.

Je les observai sans réussir à comprendre. À l’évidence, Juan vivait ici et Silvia également, puisque je la voyais évoluer, désinvolte, dans l’appartement avec Mirko, le bébé. Mais si, dans un premier temps, j’avais cru que le peintre et la très jeune mère formaient un couple et sous-louaient une partie de ce logement, je changeai bientôt d’avis. En effet, pendant toute la soirée, le Vénézuélien ne fit preuve envers Silvia que d’une politesse distraite, alors qu’il posa souvent un bras autour des épaules de Mariarosa et l’embrassa même une fois dans le cou.

Au début, on discuta beaucoup des œuvres de Juan. Franco avait depuis toujours une compétence enviable en matière d’arts plastiques et un sens critique très sûr. Nous l’écoutâmes tous volontiers, à part Silvia, dont l’enfant, très sage jusqu’alors, se mit soudain à pleurer sans qu’on puisse le calmer. J’espérai un moment que Franco parlerait aussi de mon livre, certaine qu’il en dirait des choses aussi intelligentes que celles qu’il était en train de dire sur les tableaux de Juan, malgré quelques commentaires un peu aigres. Or, mon roman, nul ne l’évoqua, et après un geste d’agacement du Vénézuélien qui n’avait pas apprécié une réflexion de Franco sur le thème des liens entre art et société, on commença à discuter du retard culturel italien, du panorama politique à l’issue des élections, des échecs à la chaîne de la social-démocratie, des mouvements étudiants, de la répression policière et de ce qu’ils appelèrent la leçon française. L’échange entre les deux hommes devint vite polémique. Silvia, qui n’arrivait pas à comprendre ce que voulait Mirko, ne faisait que sortir de la pièce et y rentrer, grondant vertement l’enfant comme s’il était déjà grand, et elle intervenait régulièrement avec quelque vague phrase de désaccord, tout en promenant son petit le long du couloir ou en le changeant dans la chambre d’à côté. Mariarosa, après avoir mentionné les crèches organisées à la Sorbonne pour les enfants des étudiants en grève, évoqua Paris au début du mois de juin, pluvieux et froid, encore bloqué par la grève générale : ce n’était pas un récit de première main (elle regretta de ne pas avoir réussi à partir), mais une de ses amies lui avait décrit la ville dans une lettre. Franco et Juan écoutèrent tous deux d’une oreille distraite, sans jamais perdre le fil de leur dispute, et ils reprirent leur confrontation avec une animosité croissante.

De fait nous nous retrouvâmes, nous les trois femmes, semblables à des génisses somnolentes attendant que les deux taureaux aient fini de mesurer leurs puissances respectives. Cela finit par m’irriter. J’espérais que Mariarosa s’insérerait à nouveau dans la conversation et je comptais intervenir moi aussi. Mais Franco et Juan ne nous en laissèrent aucune possibilité. Pendant ce temps, l’enfant pleurait et Silvia le traitait de manière toujours plus agressive. Je me dis que Lila était bien plus jeune encore lorsqu’elle avait eu Gennaro. Et je m’aperçus que quelque chose m’avait conduite, pendant l’assemblée déjà, à établir un lien entre elles. Peut-être était-ce la solitude de la mère qu’avait connue Lila après s’être séparée de Nino et avoir rompu avec Stefano. Ou sa beauté : si elle s’était trouvée dans cette réunion avec Gennaro, elle aurait été une mère plus séduisante et plus déterminée encore que Silvia. Mais Lila était désormais coupée de tout cela. L’onde de choc que j’avais ressentie dans cette salle arriverait jusqu’à San Giovanni a Teduccio mais elle ne s’en apercevrait même pas, dans cet endroit où elle avait atterri et où elle s’abîmait. Quel dommage ! Je me sentis coupable. J’aurais dû l’emmener loin, l’enlever et la faire voyager avec moi. Ou du moins, renforcer sa présence en moi et mêler sa voix à la mienne. Comme en ce moment. Je l’entendis s’écrier : se taire et laisser ces deux-là parler tout seuls, c’est se comporter comme une plante verte ! donne au moins un coup de main à cette fille, pense un peu à ce que ça signifie, avoir un enfant en bas âge ! Confusion des lieux et des époques, mélange d’humeurs différentes. Je bondis et, avec sollicitude et délicatesse, enlevai l’enfant des bras de Silvia, qui me le laissa volontiers [...].

 

 

Extrait de © Elena Ferrante, L'amie prodigieuse, tome 3 : Celle qui fuit et celle qui reste, 2017.

 

 


 

 

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