Une âme pure est l'image de Dieu, et la prière purifie l'âme.

 

Quelques instants après Aimée revint, toujours courant, car elle était vive et gaie comme un petit lutin. Une bonne conscience rend le cœur si léger !

- Francinet, dit-elle, j'ai encore dix minutes à moi.

Elle tenait son livre tout ouvert sous son bras, comme pour ne pas perdre un instant à chercher la leçon lorsque l'heure sonnerait.

Le petit garçon regardait curieusement le livre d'Aimée ; il semblait désireux de savoir ce qu'il y avait dedans.

Aimée devina sa pensée ; elle s'approcha de la lucarne afin d'y voir plus clair.

- Écoute, dit-elle, je vais te lire ma leçon si tu veux. J'ai là deux pages que je dois réciter à mon grand-père, en ayant bien soin de m'arrêter aux points et aux virgules, et en faisant sentir les s et les t à la fin des mots devant les voyelles. En lisant à l'avance avec toi, cela m'exercera.

Et elle commença d'une voix claire, s'arrêtant doucement à chaque verset, avec le ton ému de quelqu'un qui comprend ce qu'il lit :

 

LA PRIÈRE

Mon enfant, lorsque tout petit votre mère vous prenait dans ses bras pour vous épargner une fatigue, lorsqu'elle vous donnait un fruit ou vous cueillait une fleur, ne vous a-t-on pas appris à joindre à votre petit sourire de reconnaissance le mot merci ! Et ne trouvez-vous pas bien naturel de remercier ainsi celle qui vous aime tant ?

Eh bien ! mon enfant, songez à une chose : ce sont les dons de Dieu dont votre mère vous comble, et vous devez aussi votre merci à Dieu. Tout ce qui vous entoure n'est-il pas son œuvre ? le fruit velouté qui pend à l'arbre du chemin, aussi bien que ces myriades d'étoiles qui rendent la nuit lumineuse ?

La petite marguerite des près, dont la collerette blanche s'emplit des gouttes de la rosée, est comme vous, mon enfant, une œuvre de Dieu. Seulement la petite pâquerette n'a point une intelligence pour admirer son créateur, ni un cœur pour l'aimer, ni une voix pour le glorifier. Elle n'a que sa beauté pour elle. Vous, petit enfant, parlez à la place de la fleur, et bénissez le nom de Dieu.

Seul dans la nature vous avez la parole ; élevez donc la voix, et faites-vous l'interprète de la nature entière. Bénissez la bonté du Créateur !

Comment, vous écriez-vous, j'oserais parler à Dieu ? Dieu est sans bornes, infini ! Et moi, petit enfant, si petit, je ne puis pas même le comprendre. La goutte de rosée qui tremble sur le sein de la marguerite peut-elle contenir l'immensité du ciel bleu ? Ma pauvre intelligence peut bien moins encore comprendre l'immensité de celui qui a fait le ciel même.

Mon enfant, approchez de plus près, et voyez. Cette petite goutte, si petite, qui se balance sur le pétale de la fleur, est en même temps si pure et si transparente qu'une parcelle du ciel bleu s'y réfléchit. La perle limpide se fait miroir, elle reflète la belle nuance des cieux ! Eh bien ! mon enfant, une âme pure est comme la goutte de rosée, elle reflète en elle l'image du Dieu infini qui a créé le monde. Plus l'âme est pure, plus l'image céleste y laisse une visible empreinte.

Soyez donc pur, mon enfant, soyez donc bon, soyez donc sage. La pureté, la bonté, la sagesse nous font ressembler à Dieu, et la prière est le lien qui nous unit à lui.

Aimée s'arrêta, sa petite voix douce tremblait. La leçon était belle, et cette leçon l'avait émue. Elle s'approcha de Francinet pour savoir ce qu'il pensait de sa lecture, et elle vit qu'il était touché lui aussi ; car il la remercia timidement, encore sérieux des choses qu'il venait d'entendre. Elle lui sourit :

- A ce soir, dit-elle ! Je suis contente, Francinet, car je vois que tu es bon, et que tu ne me détestes plus.