Il n'est pour voir que l'œil du maître. La Fontaine.

 

Pendant la seconde demi-heure, Francinet, toujours seul dans sa cave, s'amusa à regarder à travers la lucarne ce qui se passait dans la cour. De sa place c'était très facile, et cela le distrayait beaucoup.

Le domestique allait, venait, étrillant les chevaux qui hennissaient. Une foule de gens entraient et sortaient : la laitière, le boulanger, la cuisinière, et leurs conversations intéressaient le petit ouvrier.

A huit heures, le maître de la maison, M. Clertan, parut. C'était un grand vieillard sec, vif, alerte, l'œil à tout. Il passa une sorte de revue du haut en bas de la manufacture, encourageant les uns, grondant les autres, s'apercevant des négligences les plus légères, ainsi qu'il convient à un bon maître de maison.

En dernier lieu, il entra dans la cave où se tenait Francinet ; le père Jacques était présent.

- Approche, petit, dit M. Clertan d'un ton bref.

L'enfant s'avança, sa casquette à la main.

- Quel âge as-tu ?

- Neuf ans, monsieur.

- Sais-tu lire ?

- Pas beaucoup, monsieur.

- Tu serais mieux à, l'école qu'ici, mon garçon.

Francinet baissa la tête.

- La mère est veuve, monsieur Clertan, fit le père Jacques ; elle a trois enfants, et, avant de leur apprendre à lire, il faut les faire vivre.

- C'est juste, dit le vieillard. Comment t'appelles-tu, mon petit homme ?

- Francinet, monsieur, pour vous servir.

- Eh bien, François, Francinet, il faut travailler avec courage. Si l'on est content de toi, ton salaire sera augmenté ; mais si tu n'es qu'un paresseux, on te renverra.